L’histoire curieuse et insolite du retable que Federico Zuccari a peint pour la chapelle Farrattini de la cathédrale d’Amelia en Ombrie, un chef-d’œuvre précoce du peintre de la région des Marches, est une belle histoire de séparation et de retrouvailles. Aujourd’hui, nous pouvons admirer le retable Farrattini dans le lieu pour lequel il a été conçu, mais l’œuvre de Federico Zuccari est longtemps restée éloignée de son emplacement d’origine, et son retour est un événement récent. Nous pouvons nous estimer heureux: il n’y a pas beaucoup de cas de retables qui, ayant quitté leur contexte, y sont revenus des décennies, voire des siècles plus tard. Au contraire, ils sont très rares, et lorsqu’un tel événement se produit, il est généralement salué comme quelque chose de totalement inattendu, comme un événement entouré d’une aura miraculeuse. L’épisode le plus récent qui nous vient à l’esprit est celui du Triptyque Ringli du Maître de Sant’Ivo, exécuté en 1438 pour l’église de San Pietro in Avenza, un hameau de Carrare, qui a quitté le territoire apuanais peut-être dès le milieu du XVe siècle, puis est revenu sur le territoire apuanais au XVe siècle. L’œuvre a été vendue à la galerie Salamon de Milan lors d’une vente aux enchères organisée par Sotheby’s, qui l’a revendue l’année suivante à la paroisse d’Avenza, à un prix avantageux: La ténacité du curé, Don Marino Navalesi, a incité la communauté carraraise à participer massivement à la collecte des fonds nécessaires à la récupération du retable, qui a ainsi retrouvé son église dans la liesse générale, six cents ans plus tard.
Un phénomène similaire s’est produit en 1990 pour le retable de Federico Zuccari. Le commanditaire, Baldo Farrattini, membre d’une des familles les plus importantes d’Amelia (son neveu Bartolomeo, évêque d’Amelia à partir de 1562, lui succéda à sa mort), avait sans doute d’abord demandé au frère de Federico, Taddeo Zuccari, de lui confier l’œuvre.L’histoire remonte au début des années 1950, lorsque Federico Zuccari a demandé à son jeune frère de jongler, comme l’a écrit l’érudite Margherita Romano, “entre la présence d’une personnalité rigoureuse qui supervisait et peut-être achevait personnellement certaines des figures, et le désir d’autonomie et d’exprimer sa sensibilité artistique croissante en essayant d’acquérir son propre territoire, sa propre sphère de travail”. L’histoire remonte au début des années 1560 (ou peut-être même un peu avant), lorsque Federico, âgé d’un peu plus de vingt ans, était parti en Ombrie à la suite de Taddeo, qui avait été chargé de peindre l’une des chapelles latérales de la cathédrale d’Orvieto, la chapelle des Stucs, le 18 mai 1559 (Federico y travaillera également, en peignant trois histoires de saint Paul). Le jeune homme, désireux de se faire remarquer, ne tarda pas à livrer le tableau, qui resta pendant des siècles à son emplacement, la chapelle Farrattini: puis, en 1881, les héritiers déplacèrent le grand panneau de plus de trois mètres de haut dans le palais familial d’Amelia, le remplaçant sur place par une copie réalisée la même année par le peintre pérousin Alfonso Morganti, et pendant plus d’un siècle, l’œuvre resta éloignée de son lieu d’origine. Jusqu’à ce que, en mai 1990, le retable soit mis en vente chez Christie’s, avec le risque qu’il atterrisse dans une collection privée, loin de sa chapelle. Mais l’intervention providentielle de la Fondazione Cassa di Risparmio di Terni e Narni l’acheta pour 100 millions de lires et décida, avec beaucoup d’intelligence, de le faire restaurer et, deux ans plus tard, de le remettre à sa place, où il peut encore être vu aujourd’hui par tous ceux qui visitent la cathédrale d’Amelia, parmi les monuments funéraires de Baldo Farrattini, d’Ippolito Scalza, et de Bartholomé, de Giovanni Antonio Dosio.
L’audacieuse réinsertion n’est cependant pas la seule raison d’être du Retable Farrattini, qui peut être considéré comme l’une des œuvres les plus significatives de cette région de l’Ombrie, même s’il semble endommagé en plusieurs endroits, en particulier le long des fentes des planches et au niveau du visage à l’extrême gauche. Par ailleurs, il s’agit d’un ajout relativement récent au catalogue de Federico Zuccari: toutes les sources anciennes le citent comme l’œuvre de Taddeo. Il a fallu le travail de l’historienne de l’art Giovanna Sapori, dans les années 1990, pour établir la paternité exacte du tableau et l’attribuer à la main d’un très jeune Federico, qui était intervenu pour soutenir son frère surchargé, et à qui l’on peut néanmoins attribuer l’idée originale du retable. “Il me semble qu’il doit être reconnu comme l’un des rares retables de la jeunesse de Federico, précédant les grandes peintures de la cathédrale d’Orvieto, commandées en 1568”, écrit Sapori, rejoignant ainsi Mariano Guardabassi qui, dans son Indice-Guida dei Monumenti dell’Umbria de 1872, fut le premier à parler de l’œuvre comme étant “attribuée à Federico Zuccari”. Le sujet a été approfondi par Sapori dans une étude ultérieure, mais Cristina Acidini Luchinat avait déjà convenu de l’attribution dans sa monographie de 1998 sur les frères Zuccari. “Les fonds fermes, pleins de couleurs vives, audacieusement juxtaposés”, écrit l’érudite, “montrent qu’il adhère à la manière de son frère, confirmant une date antérieure au voyage à Venise” (le séjour vénitien remonte à 1564).
Le schéma de composition est l’un des plus fréquents à l’époque: Il s’agit d’une des nombreuses dérivations de la Madone du Baldacchino de Raphaël, avec la Madone et l’Enfant placés sur un haut podium, les anges en haut enlevant le rideau (bien que dans ce cas nous ne voyons pas un rideau, mais un drapé vert jade particulièrement vif couvrant le dos du trône, et les anges en haut, au lieu de déplacer les deux volets, soulèvent une couronne), et les saints disposés dans une stricte symétrie: Pierre à gauche et Saint-Barthélemy à droite, c’est-à-dire les saints éponymes du frère et du neveu du commissaire Baldo Farrattini, tandis qu’aux extrémités on a suggéré de reconnaître Sainte Lucie et Saint Jean. Les exemples qui ont pu inspirer les frères Zuccari sont nombreux, mais pour nous limiter aux artistes de la région Ombrie-Marches qui ont regardé Raphaël, ou à ceux qu’ils connaissaient le mieux, nous pouvons évoquer la Vierge à l’Enfant avec les saints que Raffaellino del Colle a peinte en 1543 pour Sant’ Angelo in Vado, la maison d’habitation de la famille Zuccari.Angelo in Vado, la ville natale de Taddeo et Federico, ou, pour la pose de l’Enfant, le Mariage mystique de sainte Catherine d’Alexandrie d’Orazio Alfani, aujourd’hui au Louvre mais autrefois à Pérouse, à San Francesco al Prato. Le tracé du retable Farrattini, développé dans un sens ascendant, est composé, équilibré, rigoureux, même si l’on observe, dans le registre inférieur, plusieurs éléments qui rompent en partie cette harmonie absolue: la marche du trône sur lequel repose le pied de saint Barthélemy et qui n’a pas de pendant du côté opposé, le genou avancé du saint dont la forme est accentuée par la lumière qui inonde le tissu rouge irisé, la nonchalance de la pose de saint Pierre qui, en outre, détourne son regard de la Vierge et de l’Enfant. Le globe sur lequel le petit Jésus pose la main est également remarquable: il ne s’agit pas d’une sphère stylisée et parfaite comme on en trouve souvent dans les œuvres de l’époque, mais il ressemble presque à un globe, à un instrument scientifique, à un morceau de réalisme vivant dans un retable qui se distingue par son classicisme marqué.
Terminons par une dernière curiosité: observez le visage à l’extrême droite, celui du personnage qui a été interprété comme saint Jean. Il regarde vers l’extérieur, vers nous, dans la pose habituelle que les artistes prennent dans le miroir lorsqu’ils se représentent. À tel point que Margherita Romano, déjà citée, a proposé (à juste titre selon moi) d’identifier dans ce visage blond et sournois, avec une barbe à peine visible, un autoportrait de Federico Zuccari lui-même, âgé d’une vingtaine d’années. Il s’agit en effet d’un visage très caractérisé, dont certains détails somatiques peuvent être comparés aux portraits du Federico adulte: les grands yeux expressifs, la longue arcade sourcilière, le nez prononcé, le front large. Voici donc le tout jeune Federico Zuccari, déjà autoritaire et sûr de lui comme il le sera tout au long de sa carrière, qui nous regarde depuis son retable, à l’intérieur de la cathédrale d’Amelia, dans la splendide chapelle pour laquelle il a été peint, d’où il a été enlevé et où il est finalement revenu, comme dans les plus belles histoires qui se terminent bien.
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