Quand on pense à Bari , on l’associe inévitablement à son saint patron, Nicolas, l’un des saints les plus vénérés de la peinture. Quiconque accède à la vieille ville par la mer est confronté à la masse cubique du presbytère de la basilique de Nicolae (fig. 1), qui s’élève au-delà de la muraille, aujourd’hui promenade, mais qui, jusqu’au début du XXe siècle, constituait une ligne de partage des eaux entre la ville et la mer, qui s’y déversait. On peut penser qu’au Moyen Âge, une telle vue devait être très évocatrice et devait émouvoir ceux qui, marins ou pèlerins, arrivaient ou partaient de Bari.
1. Bari, basilique Saint-Nicolas. Ph. Crédit Berthold Werner |
Les sources
Selon la Vie de saint Nicolas de Michel l’Archimandrite (Cioffari 1987, p. 22), écrite au VIIIe siècle, Nicolas est né à Patara, l’une des principales villes de Lycie, dans le sud-ouest de la Turquie, vers 255 après J.-C. ; élu évêque de Myre (l’actuelle Demre), il participa au concile de Nicée (325), où il mourut quelques jours plus tard. Le saint devint “Bari” par adoption à partir de 1087, à la suite de la translation des reliques par soixante-deux marins qui, avec trois caravelles, amenèrent les restes sacrés dans l’actuelle capitale des Pouilles (Lavermicocca 1987, p. 12). Les causes qui ont poussé les marins à commettre ce vol sont de différentes natures, divines et pratiques. Selon la Légende de Kiev, où auraient convergé des témoignages directs liés à l’entreprise, Nicolas serait apparu en rêve à un prêtre de Bari, lui confessant qu’il ne souhaitait plus rester dans un lieu profané par les Turcs, thèse également reprise par le Compilateur franc, selon lequel Dieu aurait révélé à un moine sa volonté de transférer les reliques de Nicolas dans la ville qui était le siège du catalanat byzantin. Divers souverains et personnages influents tentèrent en vain de s’emparer des reliques, tandis que les habitants de Bari y parvinrent parce que telle était la volonté de Nicolas (Corsi 1987, p. 44), devançant ainsi les Vénitiens, eux aussi intéressés à s’emparer du butin sacré, qui aurait inévitablement conféré à leur ville un plus grand prestige, avec toutes les conséquences socio-écononiques qui s’ensuivraient. Les Vénitiens, en effet, entre 1099 et 1100, achevèrent l’œuvre des Bariens en nettoyant la tombe des quelques ossements restants de Nicolas à Myra ; transportés à Venise, ils sont encore vénérés dans l’église de San Nicolò sur le Lido.
Myra, avec Antioche, Constantinople et Alexandrie en Égypte, était l’une des destinations privilégiées et les plus fréquentées sur les routes commerciales de Bari. Après avoir tenté, en vain, de soudoyer le clergé de Myre et les gardiens du tombeau du saint, les marins parvinrent à s’emparer du crâne et des os longs de Nicolas et quittèrent le port de Myre dans la soirée du 20 avril pour débarquer dans le port de Bari le 9 mai 1087, un dimanche qui allait devenir mémorable (Lavermicocca 1987, p. 14). Avec l’appui du peuple, les reliques furent confiées à Elias, abbé du monastère de Saint-Benoît ; Bari possédait déjà une cathédrale, mais l’archevêque Ursone confia à Elias le soin de superviser les travaux de la basilique qui abriterait les reliques sacrées, dont la crypte fut consacrée dès octobre 1089 par le pape Urbain II, alors qu’Elias était consacré archevêque de Bari.
La narration des événements est très détaillée dans le Tractatus de translatione sancti Nicolai confessoris et episcopi, écrit en 1087, ou au plus tard l’année suivante, par Nicéphore, clericus probablement bénédictin, et dans la Translatio sancti Nicolai episcopi ex Myra de Giovanni Arcidiacono, tous deux de Bari (Corsi 1987, p. 37). Alors que Nicéphore avait été engagé par les nobles de la ville, Giovanni Arcidiacono, l’un des proches collaborateurs d’Ursone, vantait la dimension religieuse créée par l’arrivée des reliques dans la capitale des Pouilles. Dès lors, Bari devint une destination privilégiée pour les pèlerins, une étape commune pour les voyageurs se rendant par mer ou par terre en Orient et, inversement, en Occident, tandis que Nicolas s’élevait au rang de patron des marins et des navigateurs et de saint œcuménique, une tentative poursuivie par Urbain II lui-même, qui, en 1089, avait essayé de créer les conditions pour reconstituer l’unité entre les Églises d’Orient et d’Occident, drastiquement interrompue avec le schisme de 1054 (Otranto 1987, p. 68).
La véritable effigie
L’iconographie de saint Nicolas en tant que saint priant s’est imposée entre le IVe et le VIe siècle, alors que ce n’est que plus tard qu’est apparue l’image du saint en pied, représenté avec l’évangéliaire et en train de bénir; La plus ancienne icône représentant le saint et conservée au monastère de Sainte-Catherine sur le mont Sinaï, datée entre le VIIe et le VIIIe siècle, semble se référer à ce dernier modèle (Lavermicocca 1987, p. 20). 20): Nicolas est représenté entre les saints Pierre, Paul et Jean Chrysostome (fig. 2).
Dans la basilique de Bari, comme dans celle de Myre, les reliques étaient placées sous le sol, surmontées d’une grande icône qui, dans son état actuel, est celle offerte en 1319 par Uroš Milutin, souverain de Serbie (fig. 3), sur laquelle a été modelée une gravure (fig. En 1584, le Dalmate Natalij Bonifatius a réalisé une gravure (fig. 4) pour le noble Domenico Danesio Poliziano, devenant ainsi une image indispensable pour de nombreuses reproductions nicolaïques: saint Nicolas est représenté en pied, tenant l’Évangile de la main gauche et levant le bras droit vers le Christ, représenté en demi-longueur au niveau du visage du saint, de même, mais du côté opposé, que sa mère Marie. À ses pieds, en revanche, sont agenouillés dans une attitude de prière Uroš Milutin et son épouse Simonida (Calò Mariani 1987, pp. 98-137). L’icône serbe est donc devenue l’image la plus vénérée de saint Nicolas, au point d’être reproduite sur des toiles, des gravures, des ex-voto et des petites bouteilles contenant la “sainte manne”, une substance qui suinte de la relique sacrée et qui est recueillie chaque année. Au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, l’effigie des souverains est toutefois préférée aux images représentant les miracles du saint, avec l’apparition du jeune échanson Adeodato et le miracle des trois enfants qui, déchiquetés et salés par un aubergiste peu scrupuleux, furent ressuscités par saint Nicolas (Calò Mariani 1987, p. 108).
2. Icône avec les saints Paul, Pierre, Nicolas et Jean Chrysostome (VIIe-VIIIe siècle ; Sinaï, monastère de Sainte-Catherine d’Alexandrie). |
3. Icône serbe de saint Nicolas avec les portraits des donateurs, le roi Uroš Milutin et Simonida (1319 ; Bari, basilique Saint-Nicolas, crypte). |
4. Natalij Bonifatius, Réplique de la véritable effigie de saint Nicolas (1584 ; gravure ; Paris, Bibliothèque nationale) |
Le développement de l’iconographie nicolaïque
Dans les Pouilles , le développement de l’iconographie s’accompagne de la multiplication des édifices cultuels dédiés à saint Nicolas (Sant’Agata di Puglia, Gravina in Puglia, Mola di Bari) ou des villages portant le nom du saint thaumaturge (pensons, par exemple, à l’actuelle commune de Sannicola, non loin de Gallipoli).
Après la traslatio, le nombre d’images nicolaïques a donc augmenté ; à partir du XIe siècle, saint Nicolas apparaît principalement à l’intérieur d’églises creusées dans le roc, comme dans la crypte de Santa Maria degli Angeli à Poggiardo (fig. 5), dans le Salento, à partir de la fin du XIe siècle, où saint Nicolas côtoie la Vierge Odegitria dans un diptyque offert par les commanditaires de la fresque, Léon et son épouse (Milella Lovecchio 1987, p. 81) ou encore dans la crypte de saint Nicolas près de Mottola, dans la région de Tarente, où l’effigie du saint thaumaturge a été commandée par le prêtre Sarulo. Il s’agit de cas où le saint est représenté le plus souvent en holosome, c’est-à-dire en figure pleine (outre les cas mentionnés ci-dessus, il y a ceux de la crypte des saints Marina et Christina à Carpignano (fig. 6), où saint Nicolas apparaît dans une fresque du IXe siècle et dans une autre du XIe siècle entre saint Théodore et sainte Christina - Jacob 1983-84, pp. 103-123 ; Falla Castelfranchi 2004, pp. 207-221 - , dans la crypte de San Biagio à San Vito dei Normanni (fig. 7) dans la région de Brindisi, ou dans des édifices de culte sub divo (“sous le ciel”, en plein air) dans l’église de Santa Marina à Muro Leccese et, enfin, dans la crypte de Santa Lucia à Brindisi).
En demi-longueur, saint Nicolas se trouve dans la crypte de la Chandeleur à Massafra, datant du XIIIe au XIVe siècle, dans la crypte du Crucifix à Ugento (fig. 8) et dans la crypte de la Coelimanna à Supersano, toutes deux datant de la moitié du XIVe siècle. Dans tous ces cas, les peintures sont influencées par les modèles artistiques byzantins, avec des figures sans profondeur, fortement aplaties et frontales, tandis que d’un point de vue formel, les proportions de saint Nicolas sont toujours plus grandes que celles des autres saints, très certainement pour souligner la position privilégiée accordée au saint thaumaturge.
L’iconographie du saint est donc codifiée dès le XIe siècle, facilement reconnaissable car l’évêque porte le phailonion (le manteau qui descend jusqu’aux chevilles), le stichàrion (la tunique) et l’homophorion (la ceinture qui passe autour du cou et tombe sur les épaules) en forme de V crocesignato. Le visage est généralement celui d’un homme d’âge moyen, chauve, au front haut et ridé et à la barbe courte et frisée. Ces éléments iconographiques ont connu une codification qui les a amenés à se répéter de la même manière en Orient et en Occident ; grâce à la survenue d’événements historiques majeurs tels que la chute de Jérusalem (1187), la conquête de Byzance (1204) et l’expansion vénitienne concomitante le long de l’Adriatique et de la Méditerranée orientale, les conditions ont été créées pour un changement de cap, avec un processus d’occidentalisation qui a touché les terres situées sur la rive opposée aux Pouilles. Grâce à la diffusion de plus en plus sensible des produits cultuels (comme les manuscrits et les icônes) et au déplacement physique des artisans d’un lieu à l’autre, les caractéristiques formelles et iconographiques déjà identifiées au cours des siècles précédents se retrouvent dans les images de saint Nicolas au cours des siècles suivants. En outre, au XIIIe siècle, le développement des représentations dédiées au saint de Myre s’est poursuivi dans des contextes rocailleux et sub-divisionnaires, dans lesquels des représentations fortement dévotionnelles et didactiques ont été réalisées. Saint Nicolas apparaît en compagnie de la Vierge Marie ou d’autres saints: le meilleur exemple est fourni par les fresques de la crypte de San Vito vecchio à Gravina dans les Pouilles (fig. 9), datant de la seconde moitié du XIIIe siècle au début du XIVe siècle, détachées et conservées au Musée Pomarici de la même ville. Représenté sous de petits arcs, saint Nicolas tient une crosse de type spiralé, variante occidentale qui remplace l’attribut habituel de l’Évangile dans les images orientales contemporaines.
Parallèlement, les icônes hagiographiques se sont développées entre le XIIe et le XIIIe siècle, avec le saint représenté comme une figure intérieure et autour de lui des scènes de sa vie; l’exemple le plus important est l’icône de la seconde moitié du XIIIe siècle (fig. L’exemple le plus important est l’icône datant de la seconde moitié du XIIIe siècle (fig. 10), conservée à la galerie d’art provinciale “Corrado Giaquinto” de Bari, mais provenant de la petite église médiévale de Sainte Marguerite de Bisceglie, construite par la famille Falcone en 1197, pour laquelle les critiques ont identifié des analogies frappantes avec des œuvres de Terre Sainte, mais surtout avec l’icône du XIIe siècle de Saint Nicolas et des récits de sa vie (fig. 11) conservée dans le monastère de Sainte Catherine d’Alexandrie sur le mont Sinaï. Sur le panneau de Bari, saint Nicolas est représenté en pied, vêtu d’un habit d’évêque ; il tient l’Évangile de son bras gauche et lève l’autre en signe de bénédiction. À hauteur du visage, en demi-longueur, le Christ et la Vierge sont représentés, respectivement à gauche et à droite, lui remettant le livre et l’homophorion. Tout autour, cependant, sont représentées des scènes de la vie de Nicolas, reconnaissables grâce aux inscriptions latines figurant dans la partie supérieure des panneaux ; en partant du premier registre à gauche, on trouve le Miracle du bain, l’Éducation à la foi chrétienne, le célèbre Miracle de l’eau, l’Éducation à la foi chrétienne, l’Éducation à la foi chrétienne, l’Éducation à la foi chrétienne, l’Éducation à la foi chrétienne.L’éducation à la foi chrétienne, le célèbre épisode de la dot donnée à trois jeunes filles, le remerciement de leur père qui, manquant d’argent, les avait poussées à la prostitution, l’élection comme évêque, la Praxis de nautis (le sauvetage des marins, fig. 12), le Sortilegio di Artemide, le sauvetage de trois soldats par Nicolas d’une exécution injuste (fig. 13), la Praxis de stratelatis (sauvetage de trois officiers à la cour de l’empereur Constantin suite à une injuste condamnation à mort), les apparitions en rêve de Nicolas à Constantin et à Ablavius, l’action de grâce des deux stratelatis et, enfin, le miracle d’Adeodatus, jeune chrétien enlevé par les Sarrasins auprès desquels il avait été employé comme échanson (Milella Lovecchio 1987, pp. 122-123).
Parmi les récits liant le saint à la mer, la Praxis de nautis fait référence au voyage de certains marins vers Jérusalem, tandis que le Sort d’Artémis décrit le moment où le diable, sous les traits d’une jeune et séduisante femme, s’approche de certains marins en pèlerinage à Myre avec son bateau, et leur demande d’apporter une fiole d’huile à déposer sur le tombeau du saint. Selon la version latine de la Vie de Jean Diacre et de l’EncomiumNeophyti, qui date de 1200, saint Nicolas est apparu aux marins sur un autre bateau et leur a ordonné de vider le contenu de la fiole qui, au contact de l’eau, aurait pris feu. Dans le panneau de Bari, les scènes se déroulent toutes en plein air et leur disposition rappelle des modèles miniatures que le peintre, probablement local, devait connaître, tandis que la distribution semble rappeler celle qui constitue l’icône hagiographique peinte à fresque dans la crypte de Saint-Nicolas à Mottola ou, pour rester dans la région de Bari, celle de la grotte de Santa Maria dei Miracoli à Andria (fig. 14), datant de la seconde moitié du XIIIe siècle, mais intégrée à l’un des plus grands sanctuaires marials des Pouilles, construit dans la première moitié du XVIIe siècle. Les épisodes de la vie de saint Nicolas proviennent en fait d’une interpolation au Xe siècle avec ceux d’un autre saint, Nicolas de Sion, cofondateur du monastère de Saint-Sion, non loin de Myre, qui vécut deux siècles après saint Nicolas de Myre et mourut en 564 (Milella Lovecchio 1987, p. 92).
À cette époque, les relations s’intensifient entre les Pouilles, pont naturel vers l’Orient, et la Terre sainte, devenue un pôle d’attraction fort, où se créent les conditions de greffes culturelles mêlant les cultures byzantine et occidentale. À l’époque moderne, la peinture byzantine tardive des Pouilles est fortement tributaire de l’art crétois, une école qui a perduré au moins jusqu’en 1640 et qui a trouvé à Venise le terme de comparaison le plus rigoureux. À cela s’ajoute le phénomène, loin d’être circonscrit, des peintres crétois qui avaient établi des ateliers dans les villes d’ Otrante, de Barletta et très probablement aussi de Monopoli. Parmi les représentants les plus importants de l’école crétoise, on peut citer Andrea Rico da Candia, actif depuis 1451, à qui l’on doit le triptyque de la basilique de Bari représentant la Vierge de la Passion entre saint Jean le Théologien et saint Nicolas (fig. Les personnages sont représentés en demi-longueur, les visages sont bien tournés ainsi que les cous et Nicolas est reconnaissable à l’homophorion, type physionomique bien établi du visage, et au geste, tout à fait byzantin, de joindre le pouce et l’annulaire gauches pour indiquer la double nature du Christ.
À partir de la première moitié du XVe siècle, un style gothique tardif se répandit, en particulier dans la Terra d’Otranto, qui était spécifiquement influencé par ce qui se dessinait dans la région Ombrie-Marches et qui, dans le Salento, donna des résultats vraiment élevés grâce à la rencontre avec les approches artistiques provenant de la capitale napolitaine. Saint Nicolas a continué à être représenté sous l’architecture gothique, en holosome et en compagnie d’autres saints, comme l’indiquent les fresques peintes entre la deuxième et la troisième décennie du siècle dans l’église de Sainte Catherine d’Alexandrie à Galatina, fondée sur l’ordre de Raimondello del Balzo Orsini en 1384 et décorée de fresques et de panneaux à plusieurs reprises par le seigneur féodal. à plusieurs reprises par le seigneur féodal lui-même, son épouse Maria d’Enghien et leur fils Giovanni Antonio jusqu’à la fin du XVe siècle, ou celles peintes dans l’église de Santo Stefano à Soleto, appartenant également à la puissante famille féodale (fig. 16).
Aux peintures murales s’ajoutent les polyptyques de l’atelier Vivarini, l’un des plus prolifiques entre 1460 et 1483, qui voyagent de Venise au littoral apulien puis à l’intérieur des terres, dont celui de Santa Maria delle Grazie à Altamura, actuellement exposé à la Pinacoteca Provinciale de Bari (fig. 17).
5. Saint Nicolas, détail (IXe siècle ; Poggiardo, église rupestre de Santa Maria degli Angeli) |
6. Saint Nicolas entre les saints Christine et Théodore (XIe siècle ; Carpignano, église rupestre des saints Marina et Christine) |
7. Saint Nicolas (San Vito dei Normanni, crypte de San Biagio) |
8. Saint Nicolas (milieu du XIVe siècle ; Ugento, crypte du Crucifix) |
9. San Nicola (fin XIIIe-début XIVe siècle ; Gravina in Puglia, Museo Pomarici Santomasi, anciennement église de San Vito) |
10. Icône hagiographique de saint Nicolas et récits de sa vie (seconde moitié du XIIIe siècle ; Bari, galerie d’art “Corrado Giaquinto” ; anciennement Bisceglie, église de Santa Margherita) |
11. Icône hagiographique de saint Nicolas et récits de sa vie, détail (XIIe siècle ; Sinaï, monastère de Sainte-Catherine d’Alexandrie) |
12. Icône hagiographique de saint Nicolas et récits de sa vie, Praxis de nautis (seconde moitié du XIIIe siècle ; Bari, Pinacothèque “Corrado Giaquinto” ; anciennement Bisceglie, église de Santa Margherita) |
13. Icône hagiographique de saint Nicolas et récits de sa vie, Sauvetage de trois soldats injustement condamnés à mort (seconde moitié du XIIIe siècle ; Bari, Pinacothèque “Corrado Giaquinto” ; anciennement Bisceglie, église de Santa Margherita). |
14. Icône hagiographique avec saint Nicolas et des récits de sa vie (milieu du XIIIe siècle ; Andria, crypte de Santa Maria dei Miracoli) |
15. Andrea Rico da Candia, Madone de la Passion entre saint Jean le Théologien et saint Nicolas (1451 ; Bari, basilique Saint-Nicolas) |
16. Saint Nicolas (1420-1430 ; Soleto, église de Santo Stefano) |
17. Bartolomeo Vivarini, Saint Nicolas, détail du polyptyque (vers 1490 ; Bari, Pinacothèque “Corrado Giaquinto” ; anciennement Altamura, église Santa Maria delle Grazie) |
L’iconographie de saint Nicolas du XVIe au XVIIIe siècle
Au cours du XVIe siècle, l’élan vers la création de statues et de polyptyques en bois s’accentue et ils sont de plus en plus utilisés pour compléter les autels selon les goûts de la noblesse locale qui, dans ce cas, est le porte-parole d’une mode répandue presque partout dans le sud de l’Italie. Une fois la présence grecque réduite au minimum, les lieux de culte utilisés jusqu’alors pour le rite grec ont été modernisés, le cas de l’église San Nicola d’Altamura étant l’un des plus célèbres.
Au cours de la même période, une nouvelle iconographie de saint Nicolas est apparue, selon laquelle le saint évêque, vêtu de somptueuses robes, est assis sur un trône. Une version est celle de Gaspar Hovic (Audenarde, 1550 - Bari, 1627), peinte vers 1581 pour l’église des Capucins de Corato (fig. 18). 18) Dans la toile, les attributs habituels du saint reviennent ponctuellement, la crosse tenue par le commanditaire de l’œuvre, Adeodato, reconnaissable au fait qu’il tient un plateau avec une carafe, tandis que son lien avec la mer est souligné par la vue qui s’ouvre au-delà de l’arrière du trône.
Vers la troisième décennie du siècle, l’importation traditionnelle de peintures de Venise s’estompe, tandis que l’attention se tourne de plus en plus vers Naples. Saint Nicolas continue à être représenté seul, mais de plus en plus souvent en compagnie d’autres saints et de la Vierge: dans les Entretiens sacrés, le saint est vêtu d’une robe d’évêque, représenté avec le livre sur lequel reposent souvent trois pommes d’or, allusion à l’épisode des trois jeunes filles, et en compagnie de l’Adeodatus désormais familier et des trois enfants ressuscités. Cette iconographie est restée pratiquement inchangée même au cours des deux siècles suivants, à tel point que le culte de saint Nicolas a continué à être parmi les plus célébrés même par les nouveaux ordres religieux, en particulier les Théatins, sur lesquels nous reviendrons. À Barletta, Cesare Fracanzano (Bisceglie, 1605 - Barletta, 1652) a peint la Vierge Immaculée entre les saints Joseph et Nicolas de Bari vers 1639 (fig. 19) pour l’église de Saint-Antoine, dans laquelle il associe le culte récent de Saint Joseph, élevé en 1621 par le pape Grégoire XV à une fête universelle fixée au 19 mars, au culte plus ancien et plus répandu de Saint Nicolas, tous deux unis par la suite à l’un des thèmes les plus chaleureux de la Contre-Réforme, la Vierge conçue sans tache, dont le dogme ne fut décrété qu’en 1854 par le pape Pie IX. Vers 1651, il peint cependant le monumental retable de saint Nicolas de Bari pour l’église de San Ruggero (fig. 20), où l’évêque est représenté agenouillé, la tête légèrement tournée vers le haut, où deux putti grassouillets tiennent sa mitre et sa crosse ; frappé par la lumière divine, l’un d’eux est contraint de se protéger les yeux en levant le bras droit (Doronzo 2013, pp. 207-211).
L’un des peintres proches de Cesare Fracanzano était Carlo Rosa (Giovinazzo, 1613 - Bitonto, 1678) ; tous deux avaient déjà travaillé en 1640 à l’entreprise de peinture chorale de Santa Maria della Sapienza à Naples. Après la mort de César, Carlo, à la tête de la " Bottega bitontina“, très prolifique dans le pays de Bari, devient l’un des plus grands représentants du naturalisme dans de nombreuses régions de la ”périphérie" de la vice-royauté espagnole, comme en témoigne le cycle des Histoires de la vie de saint Nicolas et de la Vierge pour le plafond et le transept de la basilique Saint-Nicolas de Bari (fig. 21), exécuté entre 1661 et 1670, et qui a été réalisé dans le cadre d’un projet de restauration de la cathédrale de Bari . 21), exécuté entre 1661 et 1662, puis entre 1666 et 1668 (Pugliese 1987, pp. 80-90 ; Melchiorre 2000, pp. 308-315), ou le cycle des Scènes de la vie de saint Nicolas pour le plafond de la nef de l’église San Gaetano in Bitonto (fig. 22) de 1665, conservé par les Teatini qui, comme nous l’avons déjà dit, ont fêté le saint évêque en confiant à Carlo Rosa la décoration du plafond de leur maison (fig. 23, Basile Bonsante 1994, pp. 527-568).
Pour la basilique de Bari, le travail de sculpture du plafond fut confié à Caterino Casavecchia de Matera et à Michele Maurizio de Naples, déjà engagé vers 1658 dans l’exécution de nouveaux dossiers pour les stalles du chœur dans la crypte, tandis que le travail de dorure fut confié à Cesare Villano. Les travaux ont été réalisés grâce aux nombreux revenus obtenus à la suite de la peste évitée en 1656, à laquelle ont participé la couronne espagnole, les pèlerins et les fidèles, beaucoup de Naples et le vice-roi lui-même, Gaspar de Bracamonte, comte de Peñaranda, qui a financé les travaux sur le plafond du transept (Pugliese 2000, p. 106).
Dans le cas de la basilique de Bari, l’utilisation d’un plafond en bois semblait appropriée pour dissimuler les anciennes structures architecturales à une époque caractérisée par une forte modernisation baroque de l’église. Le résultat final est caractérisé par un fort dynamisme, auquel contribuent les variations continues de forme et de taille des toiles placées dans des cadres octogonaux, quadrangulaires et trapézoïdaux recouverts d’or et d’argent, entrecoupées de diverses figures plastiques, sculptées en ronde-bosse ou en haut-relief, telles que des anges, des chérubins, des bustes de saints et des éléments zoomorphes. L’aigle bicéphale, emblème des Habsbourg d’Espagne, auxquels appartenait politiquement l’Italie du Sud, est juxtaposé aux armoiries du prieur, du chapitre de la basilique, de la ville et de la province de Bari et du noble De Sangro, dans une horror vacui serrée mais élégante et jamais oppressante. Dans ses toiles, Carlo Rosa semble se rattacher à la manière de Fracanzani, mais les résultats auxquels il parvient sont le fruit d’une contamination très variée, avec des tons élevés, unis cependant par une interprétation plus douce de la couleur, selon le principe de l’effet de serre.une interprétation plus douce de la couleur, selon les innovations flamandes diffusées à Naples dans le sillage d’Antoon van Dyck par Pietro Novelli (Monreale, 1603 - Palerme, 1647) et Andrea Vaccaro (Naples, 1604 - 1670). Il s’agit donc d’un art qui explique les actes (la participation de Nicolas au concile de Nicée et l’épisode légendaire de la gifle à Arius, fig. 24) et les miracles associés à saint Nicolas (la libération d’Adeodatus à la suite de l’invocation du saint par ses parents, fig. 25), auxquels se juxtaposent d’autres messages significatifs, allant de la fondation de la basilique à l’exaltation des nouveaux cultes liés à la devotio moderna de la Contre-Réforme, comme celui de l’Immaculée Conception, représenté dans le grand tableau central de la nef, sous lequel saint Nicolas est représenté dans une barque commandée par des anges (fig. 26). Pour le transept, Carlo Rosa a exécuté une grande toile octogonale avec l’image du Père éternel, entourée de huit autres toiles représentant la Vierge et des saints, entrecoupés d’anges-caryatides. Sur les quatre trompettes reliant les arcs de la voûte d’arêtes de la zone du presbytère ont été peints à fresque les quatre évangélistes et des chérubins volants, en partie perdus, dont la date de 1662 reste un rappel de l’œuvre.
Parmi les peintres du XVIIIe siècle qui ont consacré leur attention à saint Nicolas, on trouve le Molfettois Corrado Giaquinto (Molfetta, 1703 - Naples, 1766): l’esquisse autographe (fig. 27), qui a servi de modèle au grand retable peint en 1746 pour l’église de San Nicola de Lorenesi à Rome, perdu par la suite, est conservée à la pinacothèque de Bari. Saint Nicolas, en habit d’évêque, calme solennellement une tempête marine qui menace de faire sombrer un bateau rempli de marins. La Vierge, représentée sur un banc de nuages en compagnie d’anges, participe également à l’événement miraculeux.
Pour conclure cet excursus iconographique et historico-artistique sur saint Nicolas, il convient de mentionner l’ autel en argent du saint datant de 1684, toujours en place sur le côté droit du presbytère de la basilique de Bari, et la statue du saint (fig. 28) qui est portée dans les processions maritimes et terrestres, reproduite à l’infini dans les études folkloriques consacrées à Saint-Nicolas et dans les cartes saintes de dévotion; elle a été sculptée en 1794 par le maître de l’art et de la culture de la ville de Bari. Elle a été sculptée en 1794 par Giovanni Corsi, très probablement un Napolitain qui s’était installé à Bari, comme on peut le déduire de l’inscription sur la poitrine, et qui pourrait avoir été formé dans l’atelier du plus célèbre sculpteur Giacomo Colombo, documenté à Naples de 1678 à 1731 (Pasculli Ferrara 1991, pp. 109-117).
18. Gaspar Hovic, Saint Nicolas trônant (1581 ; huile sur toile ; Corato, église des Capucins). |
19. Cesare Fracanzano, Vierge immaculée entre les saints Joseph et Nicolas de Bari (1639 ; huile sur toile, 1639 ; Barletta, église Saint-Antoine). |
20. Cesare Fracanzano, Saint Nicolas (1651 ; huile sur toile ; Barletta, église de San Ruggero) |
21. Carlo Rosa, Histoires de la vie de saint Nicolas et de la Vierge (1661-1668 ; Bari, basilique Saint-Nicolas, plafond, vue d’ensemble) |
22. Carlo Rosa, Histoires de la vie de saint Nicolas (1665 ; Bitonto, église San Gaetano, plafond, vue d’ensemble) |
23. Carlo Rosa, Saint Nicolas entre les saints Gaetano et Andrea Avellino (1665 ; Bitonto, église San Gaetano) |
24. Carlo Rosa, Saint Nicolas giflant Ario (1661-1668 ; Bari, Basilique de Saint Nicolas, plafond) |
25. Carlo Rosa, Saint Nicolas libérant Adeodatus, détail (1661-1668 ; Bari, Basilique de Saint Nicolas, plafond) |
26. Carlo Rosa, Immaculée Conception et saint Nicolas dans une barque pilotée par des anges (1661-1668 ; Bari, Basilique Saint-Nicolas, plafond) |
27. Corrado Giaquinto, Saint Nicolas sauvant des marins naufragés (avant 1746 ; huile sur toile ; Bari, Pinacothèque “Corrado Giaquinto”) |
28. Giovanni Corsi, Statue de saint Nicolas (1794 ; Bari, Basilique Saint-Nicolas) |
29. Giovanni Corsi, statue de saint Nicolas, détail (1794 ; Bari, basilique Saint-Nicolas) |
30. Bari, procession de Saint-Nicolas |
La statue de saint Nicolas est à proprement parler un mannequin vêtu, dans la mesure où la tête, les mains et les pieds sont en bois, tandis que le corps est fait de matériaux plus légers et donc plus facilement transportables lors des processions. Les caractéristiques somatiques du saint sont les mêmes que celles de l’effigie réelle, avec une peau foncée (fig. 29), en référence aux origines moyen-orientales de l’évêque, une chevelure fuyante et une barbe longue et foncée. Les mains sont sculptées de manière à ce que la main gauche puisse tenir la crosse et que la droite, avec l’annulaire et l’auriculaire repliés, soit dans une attitude de bénédiction. Le Saint Nicolas de Giovanni Corsi, depuis deux siècles, est porté en procession chaque année le matin du 8 mai à travers les rues de la vieille ville jusqu’à l’embarcadère de Saint Nicolas: transporté sur un bateau, il poursuit idéalement la procession en mer jusqu’au soir, où il est ramené sur la terre ferme, en souvenir de l’arrivée des reliques sacrées en 1087. Les solennités commencent dès l’après-midi du 7 mai, lorsqu’une procession historique solennelle appelée “Caravelle” défile dans les rues de Bari (fig. 30) et jusqu’à la place devant la basilique Saint-Nicolas, en souvenir des bateaux utilisés par les soixante-deux marins qui ont volé les reliques à Myra (Pasculli Ferrara 2017, pp. 363-371). La “Caravelle”, précédée de plusieurs “scènes scéniques” dans lesquelles sont reproduits des scènes et des miracles du saint, est accompagnée d’un très grand nombre de figurants en habits historiques. Arrivée près de la basilique, la statue de saint Nicolas est remise par les marins au prieur et au maire de la ville, un moment émouvant qui rappelle celui de la remise à l’abbé Elias de la caisse en bois contenant le butin sacré (toujours conservée dans le musée Saint-Nicolas, situé à proximité). Dans une rencontre fraternelle qui unit l’Occident et l’Orient (rappelons que Saint-Nicolas est le saint le plus invoqué dans les pays balkaniques jusqu’en Russie), les trois jours de fête attirent des milliers de pèlerins et de croyants venus du monde entier.
Bibliographie
Avertissement : la traduction en français de l'article original italien a été réalisée à l'aide d'outils automatiques. Nous nous engageons à réviser tous les articles, mais nous ne garantissons pas l'absence totale d'inexactitudes dans la traduction dues au programme. Vous pouvez trouver l'original en cliquant sur le bouton ITA. Si vous trouvez une erreur,veuillez nous contacter.