Deux mètres et demi de panneaux remplis et débordants d’or, de couleurs raffinées, d’harmonies savamment calculées. L’Ascension de Ludovico Brea rappellera à certains les équilibres d’un Piero della Francesca, à d’autres la précision lenticulaire des Flamands, sans parler de ce fond d’or qui nous ramène à la préciosité du monde gothique, actualisé cependant selon une nouvelle grammaire, pleinement Renaissance. Un chef-d’œuvre, en somme: un terme que l’on utilise aujourd’hui pour toute œuvre d’art, mais qui, dans le cas du magnifique panneau de Ludovico Brea, peut être utilisé à juste titre. En attendant, il s’agit du plus haut témoignage que nous connaissons de ce peintre moderne et cultivé, né à Nice mais qui a travaillé pendant la plus grande partie de sa carrière à Gênes. Il s’agit encore de sa première œuvre génoise certaine, et donc d’un point fixe pour la reconstruction de son activité. Troisièmement, il s’agit d’une œuvre qui synthétise admirablement la culture figurative d’un artiste qui regardait non seulement vers sa Ligurie natale, mais aussi vers la Lombardie, la Provence et les Flandres. Elle donne donc une dimension claire de ce que fut la Renaissance ligure. En outre, il est l’un des sommets de la Renaissance ligure, une terre peu connue du grand public, notamment parce qu’elle a été jusqu’à présent peu explorée par la critique.
Le sens de la Renaissance en Ligurie se trouve précisément dans cet équilibre bien calibré entre différentes langues et cultures: un melting-pot typique des ports méditerranéens du XVe siècle. On pourrait avancer un argument similaire, par exemple, pour la peinture napolitaine ou valencienne. Ce sont des sujets plus connus et plus fréquentés que la peinture ligure de la Renaissance. Ce n’est pas que les études importantes et approfondies manquent, bien sûr, mais il s’agit d’un champ d’investigation relativement récent que les historiens de l’art continuent d’étudier. De plus, c’est un sujet qui peine à s’imposer auprès du grand public en raison de la relative rareté des témoignages et de l’absence d’artistes célèbres, de grands animateurs qui ne parviennent à déplacer les foules que par la puissance évocatrice de leur nom. Pourtant, on pourrait tout dire des peintres et des sculpteurs qui ont fait la grandeur de l’art de la Renaissance ligure, sauf que leurs œuvres manquent de charme ou ne parviennent pas à séduire ceux qui se trouvent devant elles, peut-être même par hasard, parce qu’ils sont entrés dans un musée pour voir autre chose. Il en va de même pour l’Ascension de Ludovico Brea: de nombreuses personnes se rendent au Palazzo Spinola pour voir l’Ecce Homo d’Antonello da Messina ou les salles décorées de fresques de la noble demeure, et sont foudroyées par les dorures triomphantes du Niçois sans s’y attendre. Et peu importe que l’œuvre soit fragmentaire, puisqu’il s’agit du compartiment central d’un polyptyque dont les panneaux latéraux sont inconnus: son puissant magnétisme parvient à captiver même dans ces conditions.
Ludovico Brea, Ascension (1483 ; tempera et huile sur panneau de peuplier, 253 x 130 cm ; Gênes, Galleria Nazionale della Liguria in Palazzo Spinola, inv. SBAS 121489 / GNL 73/2010) |
Et dire que l’achat de ce panneau fondamental avait été accompagné de mille controverses. Le prix que l’État avait payé aux enchères pour l’obtenir, disait-on, était trop élevé: un million deux cent mille euros en 2009, au plus fort de la crise économique, semblait exagéré pour l’œuvre d’un peintre d’intérêt local et dont les cotations n’avaient jamais songé à toucher un tel chiffre. En réalité, il s’agit d’un des achats les plus importants de ces vingt dernières années, et pas seulement parce que l’Ascension est une œuvre de très grande qualité (reconnue par tous, même par ceux qui ont critiqué l’opération avec le plus de véhémence). C’est une œuvre d’une rareté exceptionnelle, c’est une œuvre dont l’histoire est bien connue, c’est une œuvre qui vient de Gênes et qui est revenue à Gênes, c’est une œuvre qui permet au public de voir l’œuvre de l’Ascension de la Vierge Marie.Il s’agit d’une œuvre qui permet de montrer au public du Palazzo Spinola une pièce fondamentale de la mosaïque colorée de la Renaissance ligure, d’une œuvre extrêmement représentative d’une période précise de l’histoire de l’art en Ligurie, et donc d’un lien fort avec le territoire, que l’État se devait de reconstruire. Il était donc juste de l’acheter, même pour une telle somme. Et aussi parce que, pour un chef-d’œuvre d’une telle ampleur, ce n’est jamais le vendeur qui décide du prix, mais l’acheteur.
L’histoire de cette œuvre, a-t-on dit, est bien connue. L’historiographe Raffaele Soprani, dans ses Vies des peintres, sculpteurs et architectes génois, inclut l’Ascension de Ludovico Brea parmi les “nombreuses œuvres dignes, véritables témoins de son habileté”, et note l’inscription qui l’accompagnait autrefois (probablement gravée sur la boiserie) dans le lieu où elle était conservée, l’église de Santa Maria della Consolazione: “Ad laudem summi, scandentisque etera Christi, Petrus de Fatio divino munere fecit hoc opus impingi Ludovico Niciae natus 1483, die 17 Augusti”. Nous savons donc tout: que l’œuvre a été peinte en 1483 et achevée le 17 août, et qu’elle a été exécutée pour décorer la chapelle du notaire génois Pietro di Fazio, dans l’église qui se trouvait alors à Artoria, qui fut ensuite démolie au XVIIe siècle pour être reconstruite dans le borgo San Vincenzo, où elle se trouve aujourd’hui (et avec les changements urbains qui ont affecté Gênes au XIXe siècle, l’église s’est retrouvée le long de la via XX Settembre, dans l’une des artères les plus fréquentées de la ville).
Avant 1483, il n’existe aucune autre trace de la présence de Ludovico Brea à Gênes, mais nous ne savons pas si l’Ascension fut sa première œuvre génoise. Ce fut certainement la plus importante et la plus appréciée, car l’artiste, après cette œuvre admirable, travailla pour plusieurs autres mécènes, signe que sa peinture sur panneau suscitait l’approbation de la clientèle génoise et la vénération des fidèles, qui priaient devant l’Ascensisone jusqu’au début du XIXe siècle.Ascensisone jusqu’au début du XIXe siècle, lorsque l’œuvre quitta l’église de la Consolation à la suite de la suppression napoléonienne des ordres religieux et se retrouva en mains privées, avant d’être finalement achetée par l’État et destinée à la Galerie nationale de Ligurie.
Et c’est ici, dans ces salles qui continuent à s’enrichir des textes fondateurs de la Renaissance ligure, que l’on peut admirer depuis 2010 cet extraordinaire manifeste du cosmopolitisme qui caractérisait l’art de l’époque dans la région: Dans l’Ascension de Ludovico Brea, la culture figurative flamande qui se manifeste surtout dans les physionomies des apôtres, la tradition italienne qui sous-tend la monumentalité du Christ et, plus généralement, le plasticisme de toutes les sculptures du tableau, coexistent dans l’harmonie la plus équilibrée. D’une manière générale, le plasticisme de toutes les figures, les suggestions françaises et provençales, ainsi que les subtilités typiques de Brea et sa palette raffinée embellissent non seulement l’ensemble (à commencer par l’or éblouissant), mais aussi chaque détail. Voici donc le Christ séraphique et triomphant, au centre du panneau, au-dessus d’une singulière amande de chérubins faite uniquement de contours et d’ombres, et flanqué de chaque côté de deux anges en symétrie, portant un rouleau en écriture gothique livresque, où nous lisons quelques mots des Actes des Apôtres (“Viri Galilaei, quid admiramini aspicientes in caelum ?”): En outre, pour ajouter une référence supplémentaire à la vaste culture de Ludovico Brea, on peut rappeler que la composition, comme Anna De Floriani (qui, avec Claire-Lisa Bionda, a porté l’œuvre à l’attention de la critique dans les années 1990), a été réalisée à partir de l’œuvre de Ludovico Brea, et non pas à partir de l’œuvre de l’artiste.l’attention des critiques dans les années 1990), montre une dette évidente envers Jean Fouquet dans la "dérivation précise de l’Ascension de la miniature d’un sujet similaire qui décore le livre d’heures d’Étienne Chevalier". Aux pieds du Christ, la Vierge et les anges sont disposés en cercle: chacun d’entre eux est caractérisé individuellement, comme c’était la coutume dans la peinture flamande de l’époque, mais la douceur des transitions tonales (regardez les robes des apôtres), l’élégance des irisations, la vivacité des tons chair sont des caractéristiques typiques de l’art de Ludovico Brea. Et si l’on devait proposer un grand nom pour l’art ligure de la Renaissance, le choix se porterait peut-être sur lui.
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