Quelle est la place de Fra Angelico dans l’évolution de l’art italien? Pavel Pavlovi&ccaron ; Muratov a posé cette question en 1929. Et c’est une question à laquelle de nombreux chercheurs, plus ou moins explicitement, ont tenté de répondre, essayant d’expliquer les raisons de cet art si pieux, si religieusement inspiré, parfois si visionnaire, au point d’être longtemps taxé, à tort, d’une sorte de dernière flambée gothique tardive. On pourrait répondre avec Maurizio Calvesi: Beato Angelico est un peintre qui “adhère aux nouveaux principes de la Renaissance et même les promeut, en insérant une vision ouvertement naturaliste dans une structure perspective claire”, et ce résidu médiéviste se trouve “précisément dans l’adhésion à une structure gothique inébranlable”.l’adhésion à une vision inébranlable de la Nature naturata, une nature immobile telle que Dieu l’a créée, exempte de mobilité, de transformations et d’assimilation au drame et aux agitations turbulentes de la sphère humaine, à un rationalisme démesuré émulant Dieu ou à une courtisanerie présomptueuse". C’est pourquoi l’art de Fra Angelico est nouveau: c’est un art qui regarde la réalité, certes, mais une réalité dans laquelle la divinité est partout présente et se révèle à travers la lumière. Un art fait pour penser et non pour contempler.
Par la lumière, comme l’a souligné Giulio Carlo Argan, Fra Angelico est parti de l’expérience humaine pour lui permettre de “s’élever jusqu’à comprendre l’idée suprême de l’être”. Et la voici, cette lumière divine qui, selon la philosophie thomiste, se reflète sur la terre et habille de reflets dorés ce chef-d’œuvre qu’est l’Annonciation de Cortone. D’après ce que nous savons, le retable, que l’on peut aujourd’hui admirer au musée diocésain de la splendide ville toscane, a été commandé à Fra’ Giovanni da Fiesole par un marchand de textile, Giovanni di Cola di Cecco, membre de la confrérie de San Domenico à Cortona et titulaire du patronage de la chapelle de l’Annonciation dans l’église de San Domenico. Le panneau était autrefois considéré comme la première des Annonciations de Beato Angelico, mais aujourd’hui, les critiques ont tendance à ne pas accorder la primauté à l’Annonciation de Cortone, qui reste néanmoins l’une des créations les plus sublimes d’Angelico.
Beato Angelico, Annonciation (vers 1434-1436 ; tempera sur panneau, 175 x 180 cm ; Cortona, Museo Diocesano) |
L’Ange annonciateur et la Vierge annonciatrice se tiennent sous un portique corinthien rappelant l’architecture de Brunelleschi et décoré, dans l’arc, d’un tondo portant la figure du prophète Isaïe: l’ange, dans sa robe rose tissée d’or, vient d’arriver et surprend la Vierge avec le livre encore ouvert, appuyé sur ses genoux. Derrière, une salle s’ouvre où l’on entrevoit un rideau rouge, et les voûtes du portique sont parsemées d’étoiles: autant de rappels des vêtements de la Vierge. Celle-ci, les cheveux blonds rassemblés sous son voile, assise sur un banc lumineux recouvert d’une étoffe de brocart d’or, ornée de cercles divisés en huit segments, croise les mains sur ses seins en signe de pieux respect pour la messagère divine. Elle est sérieuse, et elle l’est parce qu’elle est consciente de ce qui l’attend. Ainsi, elle commence à broder avec l’archange le dialogue de l’Évangile de Luc, rendu par le frère-peintre avec des lettres d’or sortant de leur bouche: “Spiritus sanctus superveniet in te”, dit l’archange. L’Esprit Saint descendra sur toi. “Ecce ancilla Domini, fiat mihi secundum verbum tuum”, répond la Vierge. Ecce ancilla Domini, fiat mihi secundum verbum tuum“, répond la Vierge, ”Ecce ancilla Domini, fiat mihi secundum verbum tuum“. Virtus Altissimi obumbrabit tibi”, répond finalement l’ange. La vertu du Très-Haut étendra son ombre sur toi.
Les innovations de la Renaissance se manifestent surtout dans le portique de marbre, raccourci en perspective oblique pour guider l’œil de l’observateur vers les figures d’Adam et Ève en haut à gauche, lors de l’expulsion du Paradis terrestre: c’est l’événement qui sanctionne l’éloignement de l’homme de Dieu, le péché originel que le fils de Marie ira racheter. Les figures allongées de l’archange Gabriel et de la Vierge s’éloignent de celles observées dans l’Annonciation du Prado et l’Annonciation de San Giovanni Valdarno, aux volumes plus solides: celles de Cortona sont plus élancées et révèlent un rapprochement avec la manière de Ghiberti, ouvrant une nouvelle phase dans l’art de Fra Angelico. Les deux figures, écrit Domenico Tumiati dans l’une des plus belles descriptions de cette scène, ne ressemblent même pas à des corps humains, mais à “une scène enchantée dans ce jardin, peut-être au-delà des verts du portique: une libellule d’or s’occupant d’une fleur céruléenne”. Tumiati note que le rose rare de la robe de l’ange, le rose de la joie, est tiré de l’observation des fleurs: “la couleur de la rose gagnée, qu’assument aussi les autres roses, vues avec leurs pétales dans une lumière douteuse”.
On ne peut imaginer cetteAnnonciation sans fleurs, sans leur valeur symbolique: et Fra Angelico, dans le jardin qui rappelle l’hortus conclusus biblique, allégorie de la chasteté de Marie, déploie un luxuriant tapis de fleurs printanières. Les roses blanches évoquent la pureté de la Mère de Dieu. Les roses rouges, quant à elles, évoquent le sacrifice du Christ sur la croix. Des trèfles à quatre feuilles symbolisent la croix. Le jardin est ensuite fermé au fond par un palmier: celui-ci rappelle également le martyre de Jésus. La prédelle, quant à elle, raconte les histoires de Marie: le Mariage de la Vierge, la Visitation, l’Adoration des Mages, la Présentation au Temple et la Dormitio. La scène de la Visitation s’ouvre en outre sur une vue merveilleuse et lumineuse du lac Trasimène, dont on peut admirer un aperçu bleu depuis la colline sur laquelle s’accroche Cortona, ouverte vers le village de Castiglione del Lago, et qui est plus ou moins le véritable morceau de paysage que l’on peut voir en direct depuis les points de vue les plus panoramiques: Anna Maria Maetzke l’a décrite comme “une vue étonnamment moderne”, une image “telle que seuls ceux qui ont laborieusement conquis un sommet peuvent l’apprécier, en respirant bruyamment, comme la femme qui grimpe avec des provisions au premier plan”. Et comment ne pas s’attarder sur la perspective michelangelesque de la basilique où se déroule la présentation, ou sur l’élégance délicate de la scène du mariage? La prédelle est un chef-d’œuvre dans le chef-d’œuvre.
Tout le reste du tableau est une poésie de la lumière, dont les vers déclament ce mystère qui, écrit Georges Didi-Huberman, “se déploie rigoureusement entre ces deux surfaces, l’une régulière, curviligne, céleste, l’autre irrégulière et terrestre”. Le vert de la pelouse et le blanc sale et terreux du portique de marbre, qui devient presque ocre à l’intérieur, sont les couleurs de la terre, animées cependant par l’or de la divinité. Et pas seulement par l’épiphanie lumineuse de la colombe de l’Esprit Saint qui vole au-dessus de la Vierge. C’est une lumière qui vit dans les accents que l’observateur saisit dans le siège de la Vierge, dans les auréoles, dans les ailes et les décorations de la robe de l’archange, dans les étoiles des voûtes, mais c’est surtout une lumière claire et délicate qui irradie toute la scène. Une lumière qui exalte ce monde que Fra Angelico a voulu décrire avec un style naturaliste, mais qu’il croyait fermement créé par la divinité. Sans s’attarder sur cette lumière, il serait difficile de comprendre la portée de son art.
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