La pause de Covid permet quelques digressions, comme celle qui suit, que le lecteur me pardonnera. L’éblouissante exposition Raffello de cette année, brillamment organisée par mon amie Marzia Faietti, m’a non seulement donné l’occasion de refaire la visite avec des personnes plutôt intéressées, mais m’a aussi permis de revenir pour des visites répétées aux Stanze du Vatican. Et c’est là, devant l’“École d’Athènes”, que m’est revenue la sournoiserie des détails, le stimulus de la foreuse de recherche sur les coins perdus de l’amplitude scénique monumentale, vraiment digne d’un grand-opéra, à l’intérieur de laquelle le jeune Urbino fait se mouvoir les masses chorales des philosophes et des génies comme dans une suprême entéléchie du plus haut savoir.
Raphaël, École d’Athènes, fresque de la Stanza della Segnatura au Vatican (1508) |
Raphaël, monochromes sur le fond médian de l’École d’Athènes. Salles du Vatican (1508) |
Ma question est la suivante: que font ces nus agités sous les hanches langoureuses d’Apollon qui attend les applaudissements des Muses pour le chant poétique qu’il vient d’émettre? En revanche, nous voyons que les deux monochromes ténus du dieu Pythéas et d’Athéna, placés par Raphaël pour protéger la pensée des Sages, sont là, sur les murs, dans leurs niches respectives. Les deux Numi apparaissent au-dessus de panneaux de marbre portant des figures difficiles à déchiffrer, au sujet desquelles les critiques n’ont pas voulu fournir de mots clairs et révélateurs. Un seul et bref passage du texte disait qu’il devait s’agir d’“antinomies”: c’est-à-dire que sous l’Athéna armée, on pouvait saisir une invitation à la paix, et sous l’Apollon lyrique musagete, tous dédiés aux arts harmonieux, on est appelé à voir la perversité de la violence et l’opportunité de la concilier. C’est une petite clé qui m’a incité à me pencher sur ce dernier tableau, qui semble être repris, ou inspiré, d’un ancien marbre romain. Il y a cinq nus masculins, auxquels s’ajoute un cri de protestation féminin. Le protagoniste, muni d’une courte massue dentelée (à ce qu’il semble), frappe une personne déjà tombée à terre et, puisqu’il s’agit de nus, nous pourrions être d’accord avec l’idée qu’il s’agit d’un affrontement d’un personnage idéal-symbolique pour lequel la punition décisive d’un vaincu est centrale. Les deux nus de gauche battent également en retraite, tandis que la femme s’oppose à ceux qui veulent utiliser les armes et l’intimidation. Si l’on rapproche cette scène de combat de celle qui suit, qui montre la tentative de violence d’un triton contre une nymphe insaisissable, la notion (toute renaissante) de “châtiment des sens” semble tout à fait plausible.
Titien, Détail de L’amour sacré et l’amour profane (1515 ; huile actuellement sur toile 118 x 279 cm ; Rome, Galleria Borghese) |
La thèse est particulièrement renforcée par une scène similaire, toujours en haut-relief de faux marbre, que Titien place quelques années plus tard sur la façade de la “Piscine d’amour” où l’on voit également une brute punie pour une tentative sexuelle, comme en témoigne la femme nue et suppliante à l’arrière-plan. Dans ce cas, les coups de l’exécution par claquage sont dirigés exactement sur les fesses du délinquant. Cette partie du corps, que nos ancêtres qualifiaient de “sans cerveau”, devient ainsi le symbole des instincts, tout en étant capable de recevoir et de transmettre des sensations glaciales.
Groupe en marbre au bord de la piscine de la villa de Poppée à Oplontis. 1er siècle av. C. |
Parmi les sculptures antiques de la période classique, on trouve diverses scènes de dissension sexuelle entre des nymphes masculines lascives (faunes, satyres, tritons, etc.) et des nymphes ou des jeunes filles récalcitrantes. Ce groupe, peut-être issu d’une composition animée hellénistique, nous le présentons ici pour confirmer l’inspiration “ romaine ” qu’a dû avoir Raphaël. En effet, le petit monochrome de l’École d’Athènes a été étudié avec une élaboration précise, presque insistante, par le Maître d’Urbino.
Notre attention se porte maintenant, par la force des choses, sur les formalités de la punition chez les Latins. Sur le plan corporel, elles étaient réservées aux hommes. Dans le domaine militaire, elles étaient cruelles, ce dont nous ne nous soucions pas. Dans le domaine civil, si l’on fait abstraction des esclaves, il ressort des documents iconographiques qu’elles n’étaient pas appliquées aux cives, mais toujours et fréquemment aux préadolescents et aux adolescents en période de formation. Les écoles “théoriques” et gymniques en étaient le théâtre, d’où les preuves, y compris visuelles. Nous savons avec certitude que les bonnes familles confiaient au bon moment leurs petits aux maîtres, c’est-à-dire aux responsables des écoles, toujours privées et payantes, dont elles attendaient à la fois les résultats de l’apprentissage et (et surtout, semble-t-il) la formation d’un caractère carré, bien forgé par les coups d’étrier. Les pauvres fesses nues des jeunes faisaient les frais de ces interventions, et la tradition, en plus d’être biblique, était très ancienne: en Grèce, le “châtiment de la sandale” était en vigueur depuis des siècles, puis celui des lanières de cuir ; à Rome, il y avait une sorte de gradation des fouets scolaires: de la ferula à la virga, puis à la scutica (hélas !). Plusieurs auteurs romains rappellent le traitement que recevaient les instituteurs plagistes, c’est-à-dire la boursouflure. Nous présentons ainsi l’enseigne publique d’une école pompéienne, qui attirait les familles désireuses d’obtenir d’excellents résultats.
Enseigne d’une ancienne école romaine, à Pompéi. Dessin de la fresque. (Voir “Rome, Musée de la civilisation romaine”). |
L’ambiance est très noble. Les élèves judicieux tiennent les tabulae sur leurs genoux, tandis que le garçon agité est dans la position bien connue du catotum, mot argotique signifiant “se tenir sur les épaules”. En effet, un compagnon costaud est obligé de le tenir sur les épaules et un grand de lui tenir les pieds: la position est évidente, et c’est le maître lui-même qui intervient pour administrer la punition, qui sera, le cas échéant, poursuivie par l’aide-soignant qui suit. Tout cela comme un manifeste public !
Au Moyen Âge, où les punitions pour les adultes sont trop souvent sévères, l’éducation passe aussi par la douleur corporelle, mais les documents sont rares. On en trouve un écho inattendu en pleine Renaissance (1474) dans la première fresque de Benozzo Gozzoli où le peintre illustre la vie de saint Augustin. Ici, les parents ont déjà confié le petit et volontaire Augustin au célèbre maître de Tagaste qui, avec bienveillance, le serre contre lui tandis qu’il administre à l’enfant désobéissant (qui est déjà “sur le dos”) les nerfs sains et bien connus.
Fresque de Benozzo Gozzoli dans l’église Sant’Agostino de San Gimignano. Détail. |
Dans les siècles modernes (XVIIe et XVIIIe siècles), les figures des châtiments scolastiques disparaissent presque complètement ; mais la veine subtile de la “réprobation des sens” se glisse dans une anthologie marginale, assez répandue, de toiles et de toiles, de gravures, de céramiques et de quelques sculptures, qui représentent la scène de Vénus punissant l’Amour. Un topos résolument littéraire et idéologique, sans douleur, où la déesse réprimande en fait l’imprévoyant Cupidon, cause d’amours insensées. C’était d’ailleurs déjà le cas dans les fresques pompéiennes.
Dans le tableau de Tiarini, l’Aphrodite courtisane devient une mère de la plaine du Pô, et la bastonnade se déroule selon la méthode et la posture invétérées de nos grands-mères. Dans le détail suivant de Poussin, très attentif aux thèmes éthiques, on voit les résultats décevants des escapades de Cupidon qui, ici, a enivré tout le monde et gît sur le sol, lui aussi désormais éméché.
Alessandro Tiarini, Vénus fessant Cupidon (1630 ; toile 161 x 132 cm ; Collection privée) |
Nicolas Poussin, Détail de Bacchus et Midas (vers 1630 ; Munich, Alte Pinakothek) |
Gaspero Bruschi, pour la Manufacture de Doccia, Vénus punissant Cupidon (1745-46) |
Les charmantes petites céramiques étaient également les bienvenues sur les tables des familles aisées, et le thème apparemment futile d’une mythologie lointaine révélait une conviction très ferme qui voulait que les lignées soient bien entretenues, et que les mariages ne soient pas dictés par des pulsions amoureuses, mais déterminés strictement par l’intérêt de chaque famille. Ceci nous amène à un tableau presque surprenant du peintre viennois Adam Johann Braun (1748 - 1827) qui a souvent travaillé comme illustrateur de la vie sociale de sa ville. Le sujet, si explicite, est rare et nous ne savons pas qui l’a commandé: peut-être une famille aux mœurs irréductibles (comme exemple de mise en garde pour les filles en pleine croissance), ou peut-être l’abbesse d’un pensionnat de jeunes filles très strict dans lequel le règlement ( !) interdisait aux jeunes filles éduquées de la noble prosapia tout penchant amoureux, avec les punitions précises et sensibles correspondantes ( !). Peu importe, car l’objectif était unique: les collégiennes étaient placées au monastère dans le seul but d’une éducation formelle, à l’écart des approches masculines réprouvées et interdites, et réservées pour le futur mariage décidé par le père maître.
Adam Johann Braun, Maedchenschule (L’école secondaire), 1789. Lieu inconnu |
Il s’agit ici d’une punition, mais élaborée avec soin et de manière presque émouvante. Le cadre est celui d’un pensionnat de jeunes filles d’une époque révolue, destiné aux jeunes filles nobles. Ici, la Reggitrice, ou Abbesse, selon des règles strictes et les devoirs de sa fonction, devait administrer elle-même les punitions pour les fautes des écolières. La scène laisse entrevoir un événement: la jeune fille hautaine a commis une faute (le billet en lambeaux sur le sol est censé indiquer une histoire d’amour prononcée) et l’abbesse intervient, lui rappelant par quelle punition elle doit maintenant se racheter. Mais il semble (disons) que la première partie de la conversation ait été suivie d’un aveu de culpabilité et d’une demande de pardon ; la jeune fille est amenée à réciter une prière de repentir devant le petit autel de l’étude, poussée et accompagnée par la rectrice. En fait, c’est immédiatement après que l’élève elle-même se place spontanément sur la marche de l’autel pour recevoir le châtiment qui lui est dû, et qu’elle expose bien les surfaces aurorales sur lesquelles seront imprimées les taches de la punition. L’ensemble est très émouvant: la Mère Supérieure tient les baguettes avec lesquelles elle laissera les différentes marques sur les tendres cluns. Seules les assistantes de Madame, qui ont peut-être déjà préparé les onguents apaisants, restent tremblantes, mais l’atmosphère s’élève vraiment dans un souffle poétique d’équité accomplie. En revanche, on sent que peu après, la noble écolière, tout en conservant les brûlures de l’affaire, veut se présenter à ses camarades de pension avec un air de dépassement, comme il sied à une personne de son rang. Elle conserve pour cela ses belles robes et ses bijoux. Elle traitera les brûlures progressivement, de sa peau à sa mémoire.
Pour notre part, il n’y a rien d’autre à dire sur le sketch, si ce n’est de rappeler “la grande vertu d’autrefois”, quand nos grands-mères nous assénaient leurs interventions sans cérémonie solennelle, avec leurs saintes mains décisives. Aujourd’hui, l’univers quasi unanime des pédagogues occidentaux exclut de toucher les bébés, les adultes et les jeunes boutonneux: ils grandissent ainsi, avec leurs fesses vierges.
Mais le développement choquant du bullying et de la formation de gangs, où la violence physique devient une pratique constante et provoque la ruine de tant d’autres jeunes plus faibles et plus précieux, et conduit à des épisodes et à des crimes très graves, nous dit-il quelque chose? Chaque jour, nous sommes témoins de la chronique et de l’impuissance juridique face aux bagarres juvéniles, même publiques, aux persécutions physiques, à la violence contre les femmes et les enfants, à la dévastation du patrimoine culturel ! Et nous, que faisons-nous? Ici, en Occident, ne pourrions-nous pas revenir à une pratique ancienne sacro-sainte, juste et utile? Raphaël voudrait-il encore nous enseigner ?
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