Ce que les gens mangeaient dans la Rome antique: recettes tirées du De Re Coquinaria d'Apicius


La bibliothèque Vallicelliana de Rome conserve un précieux incunable du De re coquinaria d'Apicius, le plus célèbre livre de recettes de la Rome antique: grâce à ce livre, nous savons ce qui se trouvait sur les tables des anciens Romains. Voici quelques-unes des recettes.

Un précieux incunable imprimé vers 1500 et conservé à la bibliothèque Vallicelliana est l’un des rares témoins du plus célèbre livre de recettes de l’Antiquité: le De re coquinaria d’Apicius. L’incunable (terme utilisé pour désigner un livre imprimé en caractères mobiles depuis les origines de l’imprimerie jusqu’à l’an 1500) conservé à la Vallicelliana est l’un des treize incunables du De re coquinaria encore présents dans les bibliothèques italiennes: il s’agit de l’editio princeps, c’est-à-dire de la première édition imprimée de cet ouvrage, écrit avant l’invention de l’imprimerie. Elle a notamment été imprimée à Venise par l’imprimeur d’origine albanaise Bernardino Vitali, actif dans la lagune entre 1493 et 1539, avec également une parenthèse à Rome de 1508 à 1522. L’incunable Vallicelliana nous a transmis la reprise en latin et en langue vernaculaire du quatrième siècle du texte original du premier siècle (que nous ne connaissons pas: la reprise de trois siècles est la seule façon de lire le De re coquinaria).

De l’auteur de l’ouvrage, Apicius, nous ne connaissons que son cognomen, c’est-à-dire le dernier des trois noms de l’onomastique romaine, sorte de surnom acquis au cours de la vie pour une caractéristique ou un événement survenu, et qui suivait le praenomen, c’est-à-dire le nom personnel donné à la naissance, et le nomen, c’est-à-dire le nom de famille(gens), sorte de patronyme moderne. Apicius était en fait le nom de l’auteur du De re coquinaria: l’hypothèse la plus probable pour son nom complet est qu’il s’appelait Marcus Gavio Apicius. Nous ne savons rien de ses origines familiales et il n’existe pas non plus de biographie complète à son sujet: tout ce que nous savons, c’est qu’il a vécu à l’époque de Tibère et que, d’après les anecdotes le concernant, il était un amateur de luxe et, bien sûr, un fin connaisseur de la cuisine romaine.



Comment préparer des vins spéciaux (c. 2v) et comment conserver certains aliments (c. 3r) La
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Son De re coquinaria nous donne un aperçu important de ce que l’on mangeait à l’époque romaine, en particulier des recettes les plus en vogue parmi les classes aisées: l’idée d’Apicius est précisément de fournir des recettes au lecteur en lui indiquant les procédures et les quantités d’ingrédients pour parvenir au résultat final. L’ouvrage est divisé en dix livres, dont les titres sont en grec: le premier, Epimeles, “l’expert en cuisine”, est une somme d’ astuces et de suggestions qu’Apicius conseille à ceux qui veulent cuisiner (par exemple, comment aromatiser le vin, comment faire durer les bonbons au miel, comment conserver le raisin, les pommes, les figues fraîches, les poires, les cerises, les olives). Viennent ensuite les recettes au sens strict dans les neuf autres livres: Sarcoptes (viande hachée), Cepuros (légumes), Pandecter (“Pandette”, une liste de recettes pour ce que nous appellerions aujourd’hui des “plats uniques”), Ospreon (légumineuses), Aeropetes (volailles), Polyteles (mets délicats), Tetrapus (quadrupèdes), Thalassa (mer, c’est-à-dire plats à base de poisson), Halieus (littéralement “pêcheur”): le livre contient des recettes de sauces pour assaisonner le poisson).

On se rend compte qu’il s’agit d’un livre de cuisine pour les classes supérieures à la teneur des plats créatifs et sophistiqués qui apparaissent dans l’ouvrage d’Apicius: “outre la création de plats imaginatifs à base d’autruche, de pigeon sauvage, de grue, de francolin et de beccafichi”, écrit l’érudite Clotilde Vesco, qui a également traduit De re coquinaria pour Newton, “dans le livre d’Apicius, on trouve un nombre incroyable de sauces sophistiquées, invitantes et appétissantes.... dignes d’être prouvées”. Mais son traité gastronomique laisse également “chacun libre de sa propre inventivité et - sauf dans de rares cas exceptionnels - de son propre goût”. Il y a dans cet ouvrage le véritable amour de la cuisine que chacun devrait ressentir dès qu’il s’approche de la cuisinière". Apicius permet en effet à l’apprenti cuisinier lecteur de doser les ingrédients selon son goût (bien que l’auteur indique toujours les quantités qu’il estime correctes), ou de se lancer dans des variations, par exemple en ajoutant quelque chose si, après dégustation, le lecteur qui a essayé de répéter la recette souhaite modifier l’original.

Le livre est entièrement rédigé à la deuxième personne du singulier: Apicius s’adresse directement à son lecteur. Certaines recettes sont restées pratiquement inchangées depuis lors: c’est le cas de l’Isicia (que Vesco traduit par “boulettes de viande”). "Celles de la mer, écrit l’auteur dans le deuxième livre du De re coquinaria, sont faites de homards, de crevettes, de calamars, de seiches et de crevettes d’eau douce. On assaisonne la boulette avec du poivre, du ligustic, du cumin et de la racine de laser" (le laser, également connu sous le nom de silphium, était une plante, aujourd’hui disparue, qui poussait en Cyrénaïque à l’époque romaine: de la famille des apiacées, elle ressemblait au fenouil). Non loin de nos goûts se trouve aussi la recette du sanglier au four: “Hacher du poivre, du ligustic, de l’origan, des baies de myrte dénoyautées, de la coriandre, de l’oignon ; arroser de miel, de vin, de sauce, d’un peu d’huile, chauffer, lier avec de l’amidon. Verser sur le sanglier cuit au four”. Il en va de même pour les plats de calamars ou de poulpes poêlés, qui nécessitent une cuisson à point et quelques assaisonnements simples (pour les calamars, poivre, rue, un peu de miel, du vin doux cuit et quelques gouttes d’huile, et pour les poulpes, poivre, sauce et laser). Le terme “sauce” fait référence (selon la traduction de Vesco) à un condiment particulier qu’Apicius appelait liquamen: il était fabriqué à partir d’entrailles de poisson hachées, qui étaient ensuite cuites dans une casserole avec des morceaux de poisson et laissées à fermenter. On obtenait ainsi une sauce que l’on achetait généralement toute prête: l’équivalent moderne le plus proche se trouve dans la colatura di alici typique de Cetara. Dans De re coquinaria, la sauce est utilisée dans un très grand nombre de recettes, même pour des plats qui ne sont pas à base de poisson.

Deuxième livre sur la viande hachée (cc. 4v-5r) Le
livre deux est consacré à la viande hachée (cc. 4v-5r)
Livre trois sur les légumes (chap. 6r) Le livre
trois est consacré aux légumes (cc. 6r)
Livre quatre avec un recueil de recettes (c. 8v) Le
quatrième livre contient des recettes diverses (cc. 8v)
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La plupart des recettes sont cependant très éloignées de celles auxquelles nous sommes habitués aujourd’hui. La cuisine romaine, quant à elle, fait un usage abondant des épices, utilisées pour assaisonner même les aliments les plus impensables. Les melons, par exemple, étaient aromatisés avec du poivre, du miel, du vinaigre et du silphium, ou encore les pastèques (voici la recette des pastèques bouillies: “Vous ferez bouillir les pastèques pelées avec de la cervelle blanchie, du cumin et un peu de miel ou avec des graines de céleri, de la sauce et de l’huile. Vous condenserez avec de l’amidon, vous saupoudrerez de poivre et vous apporterez le tout à table”). Ou encore les anchois frits, qu’Apicius suggère d’assaisonner avec de la sauce et du poivre, ou le “plat de poires”: “Hachez des poires bouillies et évidées avec du poivre, du cumin, du miel, de la sauce et un peu d’huile. Mélangez-les avec les œufs dans une poêle, saupoudrez de poivre et mettez à table”.

Il y a aussi des recettes qui font appel à des mélanges d’ingrédients même très éloignés les uns des autres, avec des résultats qui nous paraîtraient dégoûtants aujourd’hui. C’est le cas de la “minute apiciano”: "Faites cuire le tout ensemble: huile, sauce, vin, têtes de poireaux, menthe, poisson, petites saucisses, testicules de chapon, glandes de lattonzoli. Hacher du poivre, arroser de sauce, ajouter un peu de miel et la sauce de la poêle, ajouter du vin et du miel. Laisser bouillir. Lorsque l’ébullition est atteinte, casser une feuille de pâte et la faire épaissir en remuant bien. Saupoudrer de poivre et servir. Ou encore le "porc ortolano", un porc farci de poulet, de grives, de saucisses, de dattes, de légumes variés, à rôtir et à assaisonner avec de la sauce, du miel et de l’huile. Ou encore le lièvre farci, dont la farce est double: "pignons entiers, amandes, noix ou glands hachés, poivre dur, viande de lièvre. Mélanger le tout avec des œufs écrasés, puis envelopper le tout dans un filet de porc et le faire rôtir au four. Ensuite, préparer une deuxième farce: rue, poivre en quantité suffisante, oignon, sarriette, dattes, sauce, vin doux cuit ou moût. Faites-la bouillir longtemps jusqu’à ce qu’elle devienne épaisse et utilisez-la. Mais il faut d’abord faire cuire le lièvre dans la sauce au gingembre et au laser. Il existe également de nombreuses recettes pour farcir ou assaisonner le poulet de différentes manières. Dans le livre des gourmandises, il y a aussi des recettes de desserts. Ils n’ont pas de nom particulier (ils sont tous identifiés par la formule Aliter dulcia, “autres douceurs”) et sont tous à base de miel. Il existe, par exemple, une friandise à base de céleri: “Grattez du céleri et mettez-le dans du lait. Lorsqu’ils ont trempé, mettez-les au four pour qu’ils ne se dessèchent pas. Retirez-les chauds et arrosez-les de miel, piquez-les pour qu’ils s’imbibent. Saupoudrez de poivre et servez”. Et puis une autre pâtisserie faite avec de la pâte feuilletée: “Hacher du poivre, des pignons, du miel, de la rue et mélanger avec du vin de raisin sec. Cuire dans du lait avec une feuille de pain. Cuire quand tout est pris avec quelques œufs. Tremper dans le miel et apporter à table couvert de poivre”.

Enfin, il existe plusieurs plats dont les ingrédients ne sont plus utilisés dans la cuisine d’aujourd’hui. C’est le cas de la grue, cuisinée avec un accompagnement de navets, ou bouillie et assaisonnée d’une sauce à base de poivre, de cumin, de coriandre, de menthe, d’origan, de pignons, de carottes, de sauce, d’huile, de miel, de moutarde et de vin. On ne mange même plus les flamants roses, qu’Apicius propose de faire bouillir dans une marmite en y ajoutant des poireaux et de la coriandre à mi-cuisson et du moût à la fin, puis de les arroser d’un pesto à base de poivre, de cumin, de coriandre, de silphium, de menthe et de la sauce du flamant rose. Un plat très apprécié des Romains était ensuite le loir farci: le petit rongeur devait être farci, lit-on dans De re coquinaria, avec des saucisses de porc, du poivre, des pignons de pin, du silphium et la sauce omniprésente. Parmi les mets, outre les rôtis, les gâteaux, le jambon, les rognons, les côtelettes, les œufs et d’autres plats qui peuvent sembler plus familiers, Apicius inclut également la colocase, une plante cultivée aujourd’hui principalement à des fins ornementales, et dont le nom est " colocasia“, c’est-à-dire ”coloquinte". à des fins ornementales, et dont Apicius propose de faire bouillir le bulbe et de l’assaisonner avec du poivre, du cumin, de la rue, du miel, de la sauce et de l’huile (aujourd’hui, la coutume de manger de la colocasie ne s’est maintenue, dans les territoires autrefois contrôlés par Rome, qu’à Chypre).

Le De re coquinaria n’est pas la seule source pour connaître la cuisine romaine: la Vallicelliana conserve également un codex manuscrit, E39, qui contient le De re rustica, un livre de conseils et de recettes de Lucius Junius Moderatus Columella, un militaire qui, à la fin de sa carrière, s’est consacré à l’agriculture et, de fait, à la cuisine. Il s’agit d’un codex précieux, probablement réalisé à Florence au milieu du XVe siècle: avec le De re coquinaria, c’est l’un des traités les plus utiles pour savoir ce qu’il y avait sur les tables des Romains. Il est intéressant de noter que deux des plus anciens témoins de ces traités sont conservés dans la même bibliothèque.

Livre six sur la volaille (c. 17r)
Livre six consacré à la volaille (c. 17r)
Livre huit sur la venaison, l'agneau et le porc (c. 26v)
Livre huit consacré à la venaison, à l’agneau et au porc (c. 26v)
Colophon de l'édition princeps imprimée à Venise par Bernardino Vitali (Impressum Venetiis per Bernardinum Venetum) (c. 32v)
Colophon de l’édition princeps imprimée à Venise par Bernardino Vitali (Impressum Venetiis per Bernardinum Venetum) (c. 32v)

La bibliothèque Vallicelliana

La bibliothèque Vallicelliana de Rome est née en 1581 du legs testamentaire de l’humaniste portugais Achille Stazio (Aquiles Estaço), qui a légué son patrimoine livresque, composé de 1 700 volumes imprimés et de 300 manuscrits.700 volumes imprimés et 300 manuscrits, à la Congrégation de l’Oratoire, réunie depuis 1551 autour de Filippo Neri et à laquelle, en 1575, l’église Santa Maria in Vallicella, d’où le nom de la Bibliothèque, avait été donnée par le pape Grégoire XIII (qui reconnut officiellement la société de l’Oratoire la même année). À la collection laissée par Achille Stazio s’ajoutent les livres de Filippo Neri, qui passent à la Congrégation en 1595. Rapidement, la Bibliothèque Vallicellienne s’enrichit d’autres collections: les Archives et une partie de la Bibliothèque de San Giovanni in Venere (1585), la bibliothèque du Cardinal Silvio Antoniano, les livres de Pierre Morin et de Juvénal Ancina, les manuscrits provenant de l’Abbaye de Sant’Eutizio à Norcia, la collection du Père Gallonio, premier biographe de Philippe Neri, et enfin une partie de la collection de livres de Cesare Baronio. Dès le début du XVIIe siècle, la bibliothèque avait donc atteint des proportions considérables. Au cours des siècles suivants, elle fut d’abord mise à sac pendant l’occupation française de Rome en 1797-1799, puis en 1874, à la suite des lois sur la suppression des corporations religieuses, la Vallicelliana devint une bibliothèque de droit public. En 1883, la Società Romana di Storia Patria (Société romaine d’histoire nationale), créée en 1876 et toujours hébergée dans les locaux de la Vallicelliana, a trouvé refuge dans certains locaux de la bibliothèque. Aujourd’hui, la bibliothèque Vallicelliana, après avoir été longtemps administrée par le ministère de l’Éducation, est un institut du ministère de la Culture.

L’institut possède actuellement un patrimoine d’environ 130 000 volumes comprenant des manuscrits, des incunables, des volumes imprimés et de la musique. Il s’agit principalement d’ouvrages à caractère historique, ecclésiastique et théologique, mais il y a également des livres de philosophie (y compris de nombreux anciens commentateurs d’Aristote), de droit, de botanique, d’astronomie, d’architecture et de médecine. Parmi les pièces les plus précieuses de la bibliothèque, on trouve la Bible d’Alcuin du IXe siècle (ms. B 6), un évangéliaire grec enluminé du XIIe siècle (ms. B 133) et un précieux livre d’heures du XVIe siècle (ms. A 45), qui font partie des quelque 3 000 manuscrits de la bibliothèque. Enfin, parmi la collection d’imprimés anciens (environ 40.000 volumes, dont la plupart sont conservés dans la salle Borromini), la collection de 372 ouvrages appartenant à Filippo Neri conservés dans la Libraria (une ancienne étagère en bois commandée en 1662 par Cesare Mazzei), les annonces, les édits et les avis imprimés datant du XVIe au XIXe siècle, pour la plupart émis par les États pontificaux ou datant de la fin du XIXe siècle, ainsi que le livre d’heures du XVIe siècle (ms. A 45), qui font partie des quelque 3 000 manuscrits de la ville. La collection Vincenzo Badalocchi comprend plus de cinq cents éditions imprimées sur des sujets scientifiques et astronomiques et treize manuscrits. En outre, la bibliothèque possède une collection de 1230 gravures acquises pour la plupart ces dernières années, dont certaines pièces des XVIe et XVIIe siècles, et la collection de musique, un témoignage important du répertoire des XVIe et XVIIe siècles. Il existe également un fonds photographique d’environ 12 500 photographies, constitué au cours des vingt dernières années: il s’agit principalement d’images de villes, de sites archéologiques, de localités italiennes et européennes et de photographies témoignant de l’histoire de l’Italie aux XIXe et XXe siècles.

Bibliothèque Vallicelliana, salle Borromini
Bibliothèque Vallicelliana, Salle Borromini

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