Rome, le pédalo armé de Cristiano Carotti est un symbole des peurs des populistes xénophobes


Rome, la galerie White Noise accueille " Stessa spiaggia, stesso mare ", une exposition personnelle de Cristiano Carotti, du 17 novembre au 22 décembre 2018.

L’œuvre que Cristiano Carotti (Terni, 1981) expose du 17 novembre au 22 décembre 2018 à la galerie White Noise à Rome fera certainement débat : L’exposition de Carotti, intitulée Stessa spiaggia, stesso mare (Même plage, même mer ) et organisée par Eleonora Aloise et Carlo Maria Lolli Ghetti, présentera en effet au public l’œuvre Seagull SS17, un prototype d’instrument d’autodéfense populaire, un pédalo armé qui transforme l’icône par excellence de l’Italien en vacances sur la Riviera (le pédalo, en fait) en un instrument grossier d’autodéfense populaire. L’œuvre vise à demander comment il a été possible que la Méditerranée soit à nouveau perçue par l’opinion publique comme un symbole de peur et de menace, c’est-à-dire les émotions que la mare nostrum suscitait chez les marins d’une époque antérieure à la modernité.

Avec Stessa spiaggia, stesso mare (Même plage, même mer ), Carotti, artiste qui oscille entre la peinture, la sculpture, l’installation et la vidéo, veut ajouter une pièce supplémentaire à sa recherche sur les dynamiques sociales, explorées dans leurs dérives les plus extrêmes à travers l’étude du pouvoir archétypal du symbole au sein des communautés. En particulier, les œuvres de Stessa spiaggia, stesso mare (Même plage, même mer ) font partie du travail lié à l’étude de la Méditerranée et des flux migratoires les plus récents : en reprenant certains motifs des mythes classiques, réactualisés selon sa propre poétique, Carotti veut pousser le public à réfléchir sur les réactions perturbées que ces phénomènes provoquent dans l’opinion publique et sur la nouvelle signification menaçante de la mer dans l’imaginaire de la société italienne et européenne. À l’époque classique, les légendes qui entouraient le bassin méditerranéen mettaient en scène des monstres terribles et des créatures marines incroyables qui le gouvernaient et le protégeaient : un voyage en mer à bord d’une trirème était certainement dangereux, et des figures comme Scylla ou Charybde servaient à éloigner les marins des zones les plus difficiles. Aujourd’hui, des mots comme “invasion” et “conquête” ont remplacé “naufrage” et “tourbillon” dans le nouveau vocabulaire de la peur de la mer. "Ainsi, lit-on dans la présentation de l’exposition, un pédalo, icône populaire nationale des vacances convoitées, des vacances les plus insouciantes, devient, dans les mains de Carotti qui l’arme et le militarise, l’instrument maladroit et ridicule de ceux qui sont pris dans la peur spécieuse et galopante des migrants. De ceux qui se réjouissent de la phrase glaçante “ils devraient être coulés en mer”. Œuvre qui résume en grande partie le sens de cette exposition, le pédalo armé intitulé Seagull SS17 est une installation capable de montrer le double visage des nouveaux phénomènes xénophobes liés aux mouvements populistes : un outil grossier et inapproprié, mais aussi dangereux et menaçant. Un outil grossier et inapproprié, mais aussi dangereux et menaçant. Le support parfait pour le citoyen ordinaire qui s’apprête à affronter une mer à nouveau pleine de monstres mythologiques.



Les dix-huit sculptures en céramique (Scylla I-XVIII, 2018) de formes et de couleurs différentes (mais unies par leurs expressions menaçantes et terrifiantes) représentant des créatures à tête de loup et à corps de serpent de mer, en lieu et place des anciens tritons et torpilles, évoquent plutôt la création d’une nouvelle mythologie contemporaine inspirée de l’époque classique. Ou encore la sculpture, exposée à l’étage inférieur de la galerie White Noise, représentant une Charybde contemporaine, mi sirène mi culturiste, conçue comme s’il s’agissait d’une outre romaine retrouvée au fond de la mer lors d’une découverte archéologique. Jusqu’à l’œuvre picturale Naufrage des oiseaux, tourbillon visuel inspiré du célèbre tableau Le Radeau de la Méduse de Théodore Géricault, qui enferme dans une valse infernale toutes les figures de cette nouvelle mythologie où les créatures mythiques ont perdu leur rôle d’avertissement pour devenir des symboles grotesques de la peur pure.

L’exposition, dont l’entrée est gratuite, est ouverte du mardi au vendredi de 12 à 20 heures et le samedi de 16 à 20 heures. Pour plus d’informations : www.whitenoisegallery.it.

Photo : Cristiano Carotti, Seagull SS17, prototype d’un outil d’autodéfense populaire (2018 ; métal, plastique, émail, 165 x 390 x 220 cm).

Rome, le pédalo armé de Cristiano Carotti est un symbole des peurs des populistes xénophobes
Rome, le pédalo armé de Cristiano Carotti est un symbole des peurs des populistes xénophobes


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