Lorsqu’en 1610 Galileo Galilei (Pise, 1564 - Arcetri, 1642) quitte Padoue pour la ville convoitée de Florence afin d’occuper le poste de “premier mathématicien et philosophe du grand-duc de Toscane”, nombreux sont ceux qui, dans la cité vénitienne, regrettent le choix du grand scientifique: sa présence à l’université de Padoue a laissé des traces indélébiles. L’un de ses plus grands amis, Gianfrancesco Sagredo, lui avait écrit: “Je m’imagine bien être avec mon seigneur Galilée”, “je peux retourner dans ma mémoire beaucoup de ses raisonnements les plus doux ; mais comment l’imagination peut-elle me servir à représenter et à deviner tant de joyeuses nouveautés que je tirais de sa voix animée dans sa conversation la plus douce? [...] En cette matière donc, qui est fondée sur mon propre intérêt, je trouve le départ de Votre Excellence inconsolable et d’un déplaisir incompensable”. Galilée avait d’ailleurs passé dix-huit ans en Vénétie, où il était arrivé en 1592, année où, à 28 ans, il avait réussi à obtenir la chaire de mathématiques à l’université de Padoue: “les dix-huit meilleures années de toute ma vie”, dira-t-il dans sa vieillesse dans une lettre adressée à Fortunio Liceti en 1640. Il est donc normal qu’une exposition telle que Galileo Revolution. Art meets Science, qui se tient jusqu’au 18 mars 2018 au Palazzo del Monte di Pietà de Padoue, trouve un terrain fertile précisément sur les rives du Bacchiglione.
Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi Galilée a considéré comme heureuses les années qu’il a passées à Padoue. Ce furent des années de satisfaction personnelle et professionnelle puisque, en Vénétie, le scientifique obtint sa première chaire permanente, rencontra des amis qui lui restèrent fidèles jusqu’à la fin de sa vie (comme Gianfrancesco Sagredo, déjà cité) et que Galilée accueillait chez lui pour se livrer à ces discussions passionnées sur la science (et pas seulement) auxquelles Sagredo lui-même faisait référence dans le passage cité plus haut, il a eu l’occasion de travailler dans le milieu intellectuellement fertile et stimulant que nous connaissons par les écrits de l’époque et qui a été fixé dans l’imaginaire collectif par les scénarios et les adaptations cinématographiques de la vie du mathématicien pisan. Un environnement qui lui permet de réaliser ses premières études sur le télescope (ainsi que sur d’autres instruments scientifiques qu’il fabrique dans le laboratoire qu’il a installé chez lui) et, par conséquent, d’affiner ses premières observations astronomiques, dont les résultats seront publiés plus tard dans Sidereus Nuncius, l’ouvrage de 1610 qui a fait connaître dans toute l’Europe ses découvertes sur la Voie lactée, les satellites de Jupiter et la Lune. Mais ce n’est pas tout: à Padoue, Galilée a également eu l’occasion d’affiner son grand talent littéraire, ce qui lui a permis de renouveler radicalement la forme des études scientifiques.
Une salle de l’exposition Révolution Galilée |
Une salle de l’exposition Révolution Galilée |
Une salle de l’exposition Révolution Galilée |
L’exposition que Padoue consacre à Galilée et à ses découvertes, en se concentrant principalement sur la période que le scientifique a passée dans la ville, a pour but d’évoquer le climat fervent et passionné qui l’a accompagné tout au long de son séjour en Vénétie, mais elle présente également d’autres points d’intérêt. L’exposition, organisée par Giovanni Carlo Federico Villa et Stefan Weppelmann et promue par la Fondazione Cassa di Risparmio di Padova e Rovigo en collaboration avec l’Université de Padoue, se décline essentiellement en trois niveaux d’interprétation: trois véritables expositions dans l’ exposition qui permettent au visiteur, au premier niveau, de se plonger dans la vie de Galileo Galilei, dans son mythe et dans la contribution qu’il a apportée au progrès de la science, au deuxième niveau, d’approfondir l’affirmation du XVIIe siècle comme le siècle de la méthode scientifique, et au troisième niveau, de voir comment l’écho des découvertes du XVIIe siècle s’est propagé aux époques suivantes, jusqu’à aujourd’hui. Le tout pour une exposition éminemment populaire, pensée et conçue (avec beaucoup d’intelligence et, pourrait-on ajouter, avec le raffinement propre aux expositions de Giovanni Villa) avant tout pour le grand public. Il ne s’agit évidemment pas de la première exposition sur Galilée: parmi les nombreuses, on pense immédiatement à la splendide exposition Il cannocchiale e il pennello (Le télescope et le pinceau ) que Pise a consacrée à son illustre scientifique en 2009. Cependant, si les points de contact entre l’exposition de cette année en Vénétie et celle d’il y a huit ans en Toscane sont nombreux (beaucoup d’œuvres exposées précédemment à Pise se retrouvent à Padoue), il faut souligner les différences: alors que l’exposition de Palazzo Blu tendait à mettre en évidence l’influence des découvertes scientifiques sur les milieux artistiques de l’Italie du XVIIe siècle (on se souvient notamment d’une salle où étaient approfondies les relations entre Galilée et son grand ami Ludovico Cardi, dit Cigoli), c’est à Padoue que le sujet est abordé: A Padoue, le sujet est à peine effleuré), celle du Palazzo del Monte di Pietà tente d’offrir une perspective moins profonde mais, en revanche, plus large, en abordant différents thèmes dont nous essaierons ici de donner un résumé et qui sont liés par le leitmotiv de la figure de Galilée.
C’est d’ailleurs avec lui que s’ouvre l’histoire de Galileo Revolution, sur des tons agréablement narratifs. La première œuvre que le visiteur rencontre est le portrait de Galilée par Santi di Tito (Florence, 1536 - 1603): ce n’est pas lui qui a contribué à fixer l’image de l’artiste (le portrait que Justus Suttermans a peint lorsque le mathématicien était dans sa vieillesse, et qui se trouve actuellement aux Offices, a fait ce travail), mais c’est un tableau qui surprend l’observateur par son vif naturalisme. L’historien de l’art Federico Tognoni écrit dans le catalogue: “frappante” est la “couleur gris-bleu des yeux, que l’on retrouve également dans d’autres témoignages iconographiques de son époque, le teint légèrement éclairci par des teintes de rose autour des joues et des yeux, et [...] les cheveux courts, clairsemés et particulièrement roux, qui ne montrent encore aucun signe de grisonnement”. Galilée, presque quadragénaire si l’on accepte la date de 1603 du tableau, porte déjà une toge noire à col blanc, lui qui, jeune homme, alors qu’il était encore professeur à l’université de Pise, avait écrit un chapitre contre le port de la toge pour se moquer de ses collègues embaumés dans ce maniérisme académique contre lequel le pamphlet ironique en tercets était censé s’élever. Au contraire, dans le portrait de Santi di Tito, Galilée semble presque fier de la position qu’il a atteinte au prix de tant de sacrifices.
Santi di Tito, Portrait de Galileo Galilei (vers 1603 ; huile sur toile, 70 x 61 cm ; Grassina, collection Alberto Bruschi) |
Après avoir présenté le grand protagoniste, l’exposition de Padoue se consacre à quelques salles pour introduire le visiteur dans le contexte historique. Un panneau de l’artiste flamand Domenico Remps (vers 1620? - Florence?, vers 1699) résume la curiosité intellectuelle qui caractérisait le XVIIe siècle. Il s’agit du célèbre Scarabattolo, une sorte de vitrine qui abrite une collection d’objets bizarres rassemblés par un collectionneur: petits tableaux, crânes, camées, coquillages, brins de corail, perles, insectes, estampes et objets d’orfèvrerie. L’exposition ne pouvait manquer d’évoquer l’usage au XVIIe siècle des Wunderkammern, ces “chambres des merveilles” dans lesquelles étaient rassemblés des objets de famille, des artefacts et des curiosités d’origines les plus diverses: non seulement des œuvres d’art, mais aussi des trouvailles naturelles et des objets exotiques qui témoignent du désir d’investigation et de découverte qui caractérisait une époque marquée par d’énormes changements dans la sphère scientifique. Des changements qui ont radicalement renouvelé ce que l’on savait alors de la terre, de l’univers, des étoiles, du mouvement des planètes, mais aussi du fonctionnement du corps humain.
Avant le XVIIe siècle, il n’y avait guère de différence entre l’astronomie et l’astrologie: les représentations antérieures de l’univers n’étaient pas basées sur des calculs géométriques et mathématiques (elles le deviendront après Galilée), mais reposaient simplement sur l’expérience et sur des mythes et croyances superposés (par exemple, ceux qui affirmaient que les personnes nées à un certain moment de l’année, et donc avec une disposition particulière des étoiles dans le ciel, étaient soumises à certaines influences ou inclinations de caractère). La connaissance du ciel selon le monde antique est représentée dans l’exposition par le De mundi et sphere declaratione d’Hyginus, astronome ayant vécu au premier siècle de notre ère et dont l’ouvrage a connu une certaine fortune au XVe siècle, au point d’être imprimé et accompagné d’illustrations (importantes car il s’agit des premières représentations des constellations publiées dans un livre imprimé). Il s’agit certes encore de représentations astrologiques, relevant plus du mythe que de la science, mais capables d’exercer une grande fascination: en témoignent les deux cartes célestes d’Albrecht Dürer (Nuremberg, 1471-1528), l’une consacrée à l’hémisphère nord et l’autre à l’hémisphère sud, toujours liées à la classification ptolémaïque et dont les constellations sont représentées dans un style proche de celles de l’édition imprimée du traité d’Hyginus. Il faudra attendre le génie multiforme de Léonard de Vinci (Vinci, 1452 - Amboise, 1519) pour une approche différente de l’étude du ciel: Léonard se concentre sur l’observation de la Lune (à laquelle il aurait voulu consacrer un traité, mais l’idée ne s’est jamais concrétisée) et parvient, un siècle avant Galilée, non seulement à délimiter avec une certaine précision le cycle des phases lunaires, mais aussi à expliquer le phénomène de la lumière cendrée (l’effet par lequel, avant et après la nouvelle lune, dans l’obscurité de la nuit, le soleil se lève et se couche sur la terre). avant et après la nouvelle lune, en plus du croissant éclairé par le Soleil, on peut voir le reste du disque lunaire, éclairé par la lumière que la Lune reçoit réfléchie par la Terre) et à percevoir l’irrégularité de la surface lunaire qui, à l’époque, se voulait lisse et parfaite. On peut voir un dessin dans lequel Léonard propose une représentation simple mais innovante de la Lune, avec ses océans, ses cratères, ses montagnes, c’est-à-dire les aspérités qui, dans l’Antiquité, étaient considérées comme des “taches” qui salissaient l’image de la Lune et que beaucoup essayaient d’expliquer en invoquant les raisons les plus fantaisistes (des vapeurs ou des nuages non spécifiés qui la traverseraient, aux ombres des montagnes terrestres).
Domenico Remps, Scarabattolo o Natura morta a deception (seconde moitié du XVIIe siècle ; huile sur panneau, 99 x 137 cm ; Florence, Museo dell’Opificio delle Pietre Dure) |
Les deux cartes d’Albrecht Dürer |
Albrecht Dürer, L’hémisphère nord du globe céleste. Carte céleste boréale (1515 ; gravure sur bois, 420 x 427 mm ; Florence, Galerie des Offices, Cabinet des dessins et des estampes) |
Albrecht Dürer, L’hémisphère sud du globe céleste. Carte céleste australe (1515 ; gravure sur bois, 421 x 432 mm ; Florence, Galerie des Offices, Cabinet des dessins et des estampes) |
Léonard de Vinci, Variation de la figure de la lune dans ses phases (1505-1508 ; plume et encre, 59,6 x 44,4 cm ; Milan, Veneranda Biblioteca Ambrosiana) |
Léonard de Vinci, Deux dessins de la face de la lune, Discours sur la réfraction des rayons du soleil sur l’eau, détail (1505-1508 ; plume et encre, 59,6 x 44,4 cm ; Milan, Veneranda Biblioteca Ambrosiana) |
La lente progression vers les conquêtes galiléennes trouve deux chapitres importants dans les figures de Tycho Brahe (Knutstorp, 1546 - Prague, 1601) et de Johannes Kepler (Johannes von Kepler, Weil der Stadt, 1571 - Regensburg, 1630). Les études du premier, qui utilisent des modèles planétaires novateurs et modernes que l’astronome danois a également développés à l’aide de nombreux instruments(principalement des sphères armillaires, c’est-à-dire des modèles du ciel formés d’anneaux représentant les orbites des planètes: L’exposition en présente plusieurs), ont servi de base aux découvertes de ce dernier, qui a tenté en vain de convaincre son collègue d’adhérer aux théories héliocentriques (Brahe restait convaincu que c’était le Soleil qui tournait autour de la Terre). Il est dommage que la relation entre Galilée et Kepler ne soit pas abordée dans l’exposition et soit à peine mentionnée dans le catalogue: L’astronome allemand fut en effet l’un des premiers à féliciter son confrère pisan après la publication en 1610 du Sidereus Nuncius, traité qui fit date et dans lequel Galilée, comme mentionné au début, annonçait au monde la découverte des satellites médicéens de Jupiter, la véritable nature de la Voie lactée ainsi que les aspérités qui caractérisent la surface lunaire et l’origine de la lumière émanant de la Lune (il était stupéfiant à l’époque de découvrir que la Lune ne faisait en réalité que refléter la lumière du Soleil). L’exposition de Padoue présente non seulement la première édition de l’œuvre (une estampe avec des annotations manuscrites), mais aussi les précieux dessins à l’aquarelle de 1609 avec des observations des phases de la Lune réalisées entre novembre et décembre de cette année-là. Des dessins qui démontrent également le talent artistique de Galilée, qui aurait volontiers été peintre s’il n’avait pas choisi la voie de la science, des dessins qui, comme l’écrit Franco Giudice dans le catalogue, “frappent tant par leur aspect réaliste que par la façon dont ils parviennent à rendre la plasticité de la surface lunaire”, et des dessins réalisés “en direct”, alors que Galilée observait le satellite avec son télescope, un instrument à la perfection duquel, comme nous le savons, le savant a largement contribué.
Il va sans dire que les découvertes astronomiques de Galilée finissent par captiver l’imagination des artistes qui, d’une part, commencent à représenter les cieux selon les préceptes scientifiques et, d’autre part, s’efforcent de chanter les louanges de l’astronomie. Parmi les œuvres d’art remarquables que le public rencontre au cours d’un itinéraire qui commence par l’art antique et qui a été largement négligé ici, il faut tout d’abord mentionner deux tableaux commandés à Guercino (Giovanni Francesco Barbieri, Cento, 1591 - Bologna, 1666) par le cardinal Laurent de Médicis:Atlas etEndymion, peints respectivement en 1646 et en 1647. Dans la première toile, qui représente le géant mythologique contraint par Zeus, en guise de punition, à porter sur ses épaules le poids de l’univers tout entier, la disposition des étoiles dans la voûte céleste est aléatoire et ne reflète aucun ordre scientifique: intéressant, en ce sens, est le parallèle que le conservateur a établi avec la sphère de l’Atlas Farnèse du IIe siècle après J.-C., où l’on observe le ciel représenté selon les théories de Ptolémée et dont Rivoluzione Galileo expose le moulage en plâtre de 1930. La situation change avecEndymion: le berger aimé d’Artémis, déesse de la lune, est représenté endormi selon l’iconographie, mais avec une longue-vue posée sur ses genoux, semblable à celle que Galilée utilisait pour ses observations. Ce détail a été interprété comme un hommage direct au savant, mort depuis cinq ans à l’époque: le chevauchement entre la figure d’Endymion et celle de Galilée avait déjà été mis en avant dans la littérature, avec Giambattista Marino qui, dans son Adonis, avait mis un éloge de Galilée dans la bouche du protagoniste (Adonis, en fait), qui était défini comme un “nouvel Endymion”: "Tu es le seul observateur de chaque mouvement de la lune [nda], / et de tout ce qui est caché en elle, / tu pourras, sans qu’aucun voile ne le ferme, / nouvel Endymion, la regarder nue.
De même, une œuvre comme les Astronomes de Niccolò Tornioli (Sienne, 1598 - Rome, 1651), une allégorie complexe dont le sens n’a pas encore été identifié avec certitude, mais qui “est certainement affectée par le débat qui s’est développé autour de la question galiléenne, qui est restée vivante même après la mort du scientifique en 1642” (selon Annalisa Pezzo dans le catalogue), est une œuvre de célébration: Dans le tableau de Tornioli aussi, le télescope est le protagoniste, utilisé par un jeune homme qui s’en sert pour observer un globe au lieu du ciel (un détail qui ferait peut-être de cette figure une personnification de l’optique) et qui est entouré de personnages de différentes périodes historiques, clairement engagés dans une discussion sur l’astronomie. Pour trouver des représentations véridiques des étoiles, il faut plutôt regarder les " Observations astronomiques " de Donato Cre ti (Crémone, 1671 - Bologne, 1749), une série de huit toiles destinées à représenter le système solaire tel qu’il était connu à l’époque, toutes de dimensions égales et peintes en 1711 par l’artiste lombard pour le noble bolonais Luigi Marsili, qui voulait les offrir au pape Clément XI “pour inciter Sa Sainteté à une specola”, c’est-à-dire pour l’encourager à construire un observatoire astronomique.
Galileo Galilei, Astronomie. Observations des phases lunaires, novembre-décembre 1609 (1609 ; manuscrit autographe sur papier, dessins à l’aquarelle sur papier, 33 x 23 x 1,7 cm ; Florence, Biblioteca Nazionale Centrale, ms. Galileiano 48 |
Deux peintures de Guercino: Atlas à gauche, Endymion à droite |
Guercino, Atlas (1646 ; huile sur toile, 126 x 101 cm ; Florence, Museo Bardini) |
Guercino, Endymion (1647 ; huile sur toile, 125 x 105 cm ; Rome, Galleria Doria Pamphili) |
Moulage de la sphère de l’Atlas Farnèse (vers 1930 ; plâtre d’albâtre, diamètre 65 cm, hauteur 75 cm ; Rome, Museo della Civiltà Romana) |
Niccolò Tornioli, Les astronomes (1645 ; huile sur toile, 148 x 218,5 cm ; Rome, Galleria Spada) |
Peintures d’observations astronomiques de Donato Creti (Rome, Cité du Vatican, Pinacothèque vaticane) |
Donato Creti, Observations astronomiques. Jupiter (1711 ; huile sur toile, 51 x 35 cm ; Rome, Cité du Vatican, Pinacothèque Vaticane) |
Un pivot fondamental de l’exposition est le Dialogo sopra i massimi sistemi de 1632, l’ouvrage avec lequel Galilée entendait offrir une sorte de résumé de toutes ses découvertes, mais qui lui a en réalité valu une condamnation pour hérésie: une condamnation qui, comme on le sait, a contraint le scientifique àabjurer afin d’éviter des conséquences bien plus graves. L’exposition évite d’entrer dans les détails des relations entre Galilée et l’Église (elle se limite à signaler que la condamnation fut aussi le produit de dissensions internes à l’Église et de la vive préoccupation pour un éventuel affaiblissement de l’autorité ecclésiastique qu’aurait entraîné la libre circulation des idées de Galilée, d’autant plus dangereuse à une époque de forts affrontements religieux). D’un côté, la communauté scientifique ne se décourage pas et le progrès des connaissances avance sans discontinuer: en témoignent les splendides pastels de l’astronome allemande Maria Clara Eimmart (Nuremberg, 1676 - 1707), surtout connue pour le grand nombre de dessins de phénomènes célestes qu’elle a réalisés à la fin du XVIIe siècle. En revanche, les découvertes de Galilée furent soumises à la censure ecclésiastique. Symbole de l’attitude des autorités religieuses, un tableau de Frans Francken II (Anvers, 1581 - 1642) représente une scène où des ânes iconoclastes s’attaquent à des instruments scientifiques à côté d’un cabinet de collectionneur. Il est à noter que le tableau, grâce à un subtil dispositif scénographique imaginé par le conservateur, est placé dans l’axe des instruments exposés dans les salles précédentes: en tournant le dos au tableau, on peut les voir tous successivement.
La condamnation du savant pisan a produit un autre effet: la construction du mythe Galilée. Toute la fin de l’exposition est consacrée à ce thème, avec des peintures et des sculptures qui, à partir du XIXe siècle, retracent toute la biographie du grand mathématicien et astronome: du tableau de Cristiano Banti (Santa Croce sull’Arno, 1824 - Montemurlo, 1904) le représentant devant l’Inquisition, à la sculpture de Cesare Aureli (Rome, 1843 - 1923) destinée à immortaliser la visite que le grand poète anglais John Milton fit à Galilée lors de son séjour en Italie en 1638, au Triomphe de la Vérité de Luigi Mussini (Berlin, 1813 - Sienne, 1888), œuvre dans laquelle la Vérité, au centre, illumine une série de personnages historiques, dont Galilée lui-même, vêtu d’une toge verte et surpris en train de montrer le livre tenu par Copernic.
Galileo Galilei, Dialogo sopra i massimi sistemi (1632 ; ouvrage imprimé avec des notes manuscrites autographes, 18,5 x 24,5 x 5,5 cm ; Padoue, Biblioteca antica del seminario vescovile) |
Maria Clara Eimmart, Apparition de Saturne (fin du XVIIe siècle ; pastel sur carton bleu, 64 x 52 cm ; Bologne, Université de Bologne, Musée Specola) |
Frans Francken II, Cabinet d’amateur avec ânes iconoclastes (huile sur panneau, 106 x 148 cm ; Chiavari, Société économique de Chiavari) |
Détail des ânes iconoclastes |
Les instruments scientifiques visibles en quittant le tableau de Frans Francken |
Cristiano Banti, Galilée devant l’Inquisition (1857 ; huile sur toile, 110 x 140 cm ; Carpi, Collection Palazzo Foresti) |
Cesare Aureli, Galileo Galilei et John Milton (1900 ; esquisse en plâtre, 60 x 60 x 120 cm ; Trevi, Museo Civico) |
Luigi Mussini, Le triomphe de la vérité, détail (1847 ; huile sur toile, 143,5 x 213 cm ; Milan, Académie des beaux-arts de Brera) |
Il est difficile de résumer complètement les réflexions que l’exposition entend animer: il n’a pas été fait mention, par exemple, des œuvres des artistes contemporains mais aussi de celles des anciens qui ont abordé le thème des mythes astrologiques (la Voie lactée de Rubens au Prado est à ne pas manquer), le discours sur les observations solaires et l’étude du rapport entre Galilée et la musique ont été omis (alors qu’un essai entier du catalogue est consacré à ce rapport), et aucune mention n’a été faite de la manière dont l’exposition se propose d’élargir son champ d’action en impliquant diverses formes d’art, y compris le cinéma et la bande dessinée. Les proportions de l’exposition de Padoue, certainement l’une des plus grandes parmi celles présentées en Italie cette année, nécessitent une visite en personne pour comprendre pleinement les idées des commissaires. L’un des points forts de Rivoluzione Galileo est l’efficacité des aménagements, conçus pour dialoguer respectueusement avec les salles du Palazzo del Monte di Pietà, tout en donnant à l’exposition une âme qui la caractérise, en se permettant même quelques passages à fort impact scénique (voir la salle où est exploré le thème des observations lunaires, ici dans la première photographie incluse dans cet article), et en conservant dans toutes les salles le motif de grands cadres colorés adossés aux murs, à l’intérieur desquels ont été disposés les objets et les œuvres exposés.
LaRévolution de Galilée est, par essence, une excellente exposition de vulgarisation, avec un parcours qui trouve son originalité précisément dans la coexistence de différents niveaux d’investigation suivis par différents registres narratifs qui vont de Guercino à Anish Kapoor, de Georges Méliès à Tintin, de Gaetano Previati à Caparezza, sans oublier les précieuses éditions originales des œuvres de Galilée et de ses notes manuscrites. Et le visiteur est laissé libre de s’orienter selon sa propre sensibilité à l’intérieur (et bien sûr au-delà) d’un parcours qui traverse quatre siècles d’histoire et se tourne vers l’avenir. À cela s’ajoute la possibilité de quitter le Palazzo del Monte di Pietà et de se rendre, en quelques pas, sur les lieux que Galilée lui-même a vécus et fréquentés.
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