Il est très rare d’entrer dans un environnement immersif et de s’abandonner complètement à ce qui nous entoure. C’est ce qui m’est arrivé à la Biennale de Venise, après avoir fait une longue queue (comme c’est devenu la coutume pour visiter certains pavillons), en entrant dans le pavillon français, dans les Giardini, à l’occasion de la 60e édition de la Biennale d’art. Ce fut uneimmersion totale dans l’ensemble de l’œuvre de Julien Creuzet, que je définirais cependant comme différente de celles qui sont à la mode ces derniers temps pour présenter de manière innovante tel ou tel artiste du passé, surtout Monet, Van Gogh et Klimt, et qui trouvent place dans des lieux “conteneurs” aujourd’hui consacrés à cet effet. Si ici, sur les murs, le sol et le plafond, des mappings vidéo sont projetés avec des images numérisées à haute définition des œuvres de l’artiste protagoniste de l’événement immersif, et que les détails de ces dernières sont rapprochés de la nième dimension afin de faire entrer le visiteur, généralement placé au centre de la salle, dans l’art de ce peintre particulier, le tout accompagné de bandes sonores en Dolby Surround, l’immersion proposée par le pavillon français est plus mentale: une fois assis au bord des salles qui composent le bâtiment, après avoir passé la longue file d’attente à l’extérieur et avoir parcouru librement, sans ordre prédéfini, les trois salles, mon esprit s’est complètement abstrait des pensées et de la réalité. complètement abstrait des pensées et du monde, se laissant transporter (et aussi détendre) par les séquences de l’œuvre musicale qui se répètent en boucle dans tout le pavillon, tandis que des images d’objets flottant dans l’eau, projetées sur des écrans, un pour chaque salle, accompagnent les mélodies avec le même calme, rendant l’ensemble extrêmement fluide et relaxant , avec une continuité étudiée.
Un autre mot clé du projet français est en effet la continuité, car en traversant les différentes “pièces” du pavillon, on ne perçoit aucun détachement, aucune rupture, mais au contraire tout est uniforme, hétérogène, tant sur le plan visuel que sur le plan sonore. La bande sonore fait référence au titre même du projet, qui a aussi la particularité d’être sous forme poétique, et déjà ici résonnent les grands thèmes de la mythologie, de la nature et de l’eau. “Attila cataracte ta source aux pieds des pitons verts finira dans la grande mer gouffre bleu nous nous noyâmes dans les larmes marées de la lune” : Cataracte d’Attila, ta source aux pieds des verts pitons finira dans la grande mer gouffre bleu nous nous noyâmes dans les larmes marées de la lune". Il s’agit d’une invitation à la liberté et à la diversité interprétative qui implique, à partir de la dimension textuelle et donc sonore, tout l’imaginaire dans lequel l’artiste entend catapulter le visiteur, avec ses couleurs, ses formes, ses sons et ses mouvements. “Cette manière de voir est sans doute ce que Julien Creuzet cherche à offrir à travers l’expérience de son œuvre. Il s’agit d’une immersion dans une poésie de formes et de sons, de volumes et de lignes mouvantes, de rencontres colorées qui forment de nouveaux langages : une expérience à vivre pleinement”, peut-on lire dans la description du pavillon sur le site officiel de la Biennale. “Une compréhension sensible et poétique du monde” qui “offre un regard plus doux pour aborder les multiples écologies de la vie”.
La France a choisi d’être représentée à la 60e Biennale d’art de Venise par un seul artiste : Julien Creuzet (Le Blanc-Mesnil, 1986), artiste franco-antillais qui vit et travaille à Montreuil. Nommé pour le prix Marcel Duchamp 2021, Creuzet a apporté à la Biennale de Venise un projet conçu par Céline Kopp, directrice du Magasin, le Centre national d’art contemporain de Grenoble, et Cindy Sissokho, commissaire d’exposition, productrice culturelle et écrivaine, à travers lequel il s’agit de réfléchir à ce que signifie être un “citoyen étranger”, conscient de faire partie d’une histoire française beaucoup plus complexe. C’est avec cette question, celle d’être considéré comme un étranger dans son propre pays, que le pavillon français a choisi d’interpréter le thème Strangers Everywhere de la Biennale. Pour Creuzet, il s’agit d’essayer de mettre l’accent sur cette question, “en transportant physiquement et symboliquement les gens dans une réalité qui n’a pas grand-chose à voir avec les institutions et les politiques culturelles. Ce n’est probablement pas réaliste, mais cela pourrait contribuer à changer certaines perspectives à l’avenir”. Un projet, donc, qui veut éviter les récits globaux et le réductionnisme culturel, et qui invite les visiteurs, dit-il, “dans un espace irrigué par des fluides dans lequel s’ouvre un imaginaire radical et collectif, peuplé de présences divines et relié à Venise par son eau”. “Ce que je veux offrir aux visiteurs de ce pavillon, explique l’artiste lui-même, c’est une zone de confluence complexe et sensorielle, une expérience profondément vécue. Pour moi, c’est l’espace. C’est un carrefour, un lieu où l’on peut tout rencontrer, surtout soi-même”.
Le monde imaginaire dans lequel Julien Creuzet souhaite plonger le visiteur est composé de plus de quatre-vingts sculptures de différents types, de six vidéos, de sept séquences musicales et d’un parfum. D’un point de vue visuel, en effet, aux images flottantes qui apparaissent sur les écrans s’ajoutent des œuvres particulières de formes et de matériaux divers qui ressemblent à des reliques qu’une marée océanique aurait ramenées à la surface et dont la plupart rappellent des éléments végétaux et animaux. On se retrouve ainsi à déambuler parmi ces créations de grande envergure, faites de métal, de plastique, de fils textiles, de textiles, de rocou (teinture issue d’une plante sauvage d’Amazonie), de fibre de verre, de perles, et de quelques œuvres en bronze, suspendues au plafond. Les formes de Julien Creuzet, comme l’indique la présentation du pavillon, “naissent d’un espace d’émancipation, qu’il faut ressentir intimement pour vraiment voir”, “un moment de réconciliation avec nos sens, ainsi qu’un espace de non-traduction et de liberté”. L’artiste entend donc offrir au visiteur uneexpérience immersive et multisensorielle des formes et des matières de ce monde libre, avec lequel il faut entrer en contact pour le comprendre vraiment et dans lequel il faut finalement se retrouver. Une intention intellectuelle d’une profonde subtilité qui réussit vraiment si l’on s’abandonne véritablement aux formes, aux couleurs, aux images et aux sons.
Les références renvoient à la culture caribéenne etlatino-américaine, des cultures imprégnées de mythes et d’idoles profondément liées à la nature et à l’eau et caractérisées par une extraordinaire diversité polyphonique. Un monde qui a beaucoup à voir avec le “merveilleux” que Creuzet connaît bien, lui qui a grandi en Martinique, une île des Caraïbes appartenant à la France, dont la culture est un mélange d’influences françaises et caribéennes. On pense à ce qu’écrivait Alejo Carpentier dans Le Royaume de ce monde, lorsqu’il parlait de la “magie de la végétation tropicale” et de la “création irrépressible de formes” par la nature, mais surtout du merveilleux qui naît d’une soudaine “révélation privilégiée de la réalité, d’une illumination inhabituelle ou singulièrement favorable de la richesse inaperçue de la réalité”, perçue avec une “intensité particulière en vertu d’une exaltation de l’esprit”. Une richesse qui se révèle donc en entrant en contact profond avec la réalité elle-même, en la vivant.
C’est sans doute en ce sens que Creuzet a voulu exprimer avec son projet comment le dialogue et l’échange au sein d’une société hybride, entre des personnes de cultures différentes bien que partageant la même nationalité, comme entre un Français de France et un Français d’outre-mer comme lui, peuvent révéler une richesse qui permet d’ouvrir des visions plus larges. Et peut-être découvrir comment des cultures apparemment distinctes peuvent avoir des thèmes communs : le monde “aquatique” créé par Julien Creuzet dans le pavillon français est un hommage aux Caraïbes, mais ne trouve-t-il pas aussi un point de comparaison avec Venise, la seule ville italienne construite sur l’eau ?
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