Si nous voulions nous représenter Prato à l’aube du XIIIe siècle, nous devrions évoquer l’image d’une ville industrieuse, à l’apogée de sa croissance économique et démographique, organisée en commune libre depuis le début du XIIe siècle, mais désireuse de trouver une identité propre qui la distinguerait de la proche Pistoia, dont elle dépendait, et de l’encombrante et puissante Florence: tels étaient les deux pôles (l’un religieux, l’autre politique) à l’intérieur desquels Prato se trouvait coincée. Et si cette opération a réussi, peut-être les habitants de Prato doivent-ils remercier la précieuse relique conservée dans leur Duomo, cette ceinture sacrée qui n’est pas seulement un objet à vénérer par les fidèles lors des expositions: cette bande de brocart fin, documentée depuis le milieu du XIIIe siècle, constitue en effet depuis des siècles un trait d’identification fort de la ville, un motif de cohésion sociale, une source de prestige incontestable, voire une ressource capable de véhiculer le nom de Prato dans le monde entier. Il va donc de soi que de nombreuses images ont été consacrées à la ceinture sacrée et à son mythe: plusieurs d’entre elles sont exposées jusqu’à la fin du mois de février dans le cadre de l’exposition que Prato consacre à sa relique.
Legati da una cintola (Liée par une ceinture - c’est le titre de l’exposition qui se tient actuellement au Museo di Palazzo Pretorio) est donc une revue centrée sur une tradition iconographique, et le grand mérite des deux commissaires, Andrea De Marchi et Cristina Gnoni Mavarelli, est d’avoir su mettre en place une structure capable de développer un large discours, Le grand mérite des deux commissaires, Andrea De Marchi et Cristina Gnoni Mavarelli, est d’avoir su mettre en place une structure capable de développer un discours large, doté de la plus grande rigueur philologique et soutenu par un projet scientifique de premier ordre, qui trouve son apogée dans larecomposition inédite du retable peint par Bernardo Daddi (Florence, vers 1290 - 1348) pour la cathédrale de Prato (probablement pour la chapelle de l’Assomption), mais qui offre aussi plusieurs autres raisons qui le rendent extrêmement convaincant. Citons-en quelques-unes: la volonté de rechercher les origines du thème iconographique de la ceinture sacrée, l’analyse des affinités et des différences entre l’iconographie de Prato et celle de Sienne, l’étude approfondie des ostensions et de la spectacularisation du culte de la ceinture sacrée. L’exposition aborde une période historique allant du XIIe au XVIIIe siècle, bien que la plus grande partie soit réservée aux œuvres et artefacts antérieurs au XVIe siècle: Un choix cohérent avec l’évolution historique du culte de la ceinture sacrée, et si l’on peut dire, obligatoire, puisque la fortune de ce thème iconographique a connu un lent déclin à partir de 1512, année du sac de Prato, l’un des événements les plus horribles de l’histoire italienne, Le chroniqueur Luca Landucci raconte que les Espagnols, sommés par le pape Jules II de rétablir le pouvoir des Médicis à Florence, “tuèrent tous ceux qui les précédaient, et il ne leur suffisait pas d’avoir un si grand butin, qu’ils ne pardonnaient pas la vie d’une seule personne”. Mais ce déclin, précise Rita Iacopino dans son essai de catalogue, est aussi dû aux “conséquences des invectives du monde protestant contre les déformations du culte des reliques, suivies après le concile de Trente par les réflexions de l’Église catholique sur les superstitions liées à certaines pratiques de dévotion”.
L’entrée du Palazzo Pretorio à Prato pour l’exposition Legati da una cintola (Liés par une ceinture) |
Une salle de l’exposition Legati da una cintola (Liés par une ceinture) |
Une salle de l’exposition Legati da una cintola (Liés par une ceinture) |
L’exposition commence par la première représentation connue du thème de la ceinture sacrée dans l’histoire de l’art occidental. Il s’agit d’un relief exécuté par l’un des plus grands sculpteurs de son temps, le Maître de Cabestany (actif entre la Catalogne et la Toscane dans la seconde moitié du XIIe siècle): Fragment probable de l’ancien portail roman de l’église Notre-Dame-des-Anges de Cabestany, ville française à la frontière espagnole, la sculpture (l’un des chefs-d’œuvre du Maître anonyme) présente, dans le style très expressif propre à l’artiste, trois épisodes du Transit de la Vierge, à savoir la sortie de Marie du tombeau (à gauche, le Christ l’accueillant dans ses bras et les apôtres assistant à la scène), l’Assomption (à droite, on voit la Vierge, les yeux dans les orbites, en train de se reposer), et leretour à la vie normale (à gauche, on voit la Vierge, les yeux dans les orbites): nous voyons la Vierge, les yeux fermés, portée au ciel par des anges), et la glorification (la scène centrale). Dans l’espace entre la sortie du tombeau et la glorification, on remarque la figure de saint Thomas tenant dans ses mains une ceinture de bijoux: selon la légende, le saint incrédule aurait reçu cet objet de la Vierge au moment de l’Assomption, comme preuve de sa réelle ascension au ciel. La présence d’une telle figuration est due au fait que le Maître de Cabestany était également actif à Prato (on dit qu’il a travaillé sur trois chapiteaux du cloître de Santo Stefano), où le culte de la ceinture était déjà enraciné au milieu du XIIe siècle.
Les origines de cette croyance sont excellemment reconstituées par Renzo Fantappiè dans sa contribution au catalogue. La légende veut que la ceinture ait été apportée à Prato en 1141 par un certain Michele da Prato, diversement identifié par les différentes variantes de l’histoire (la plus connue le fait appartenir à la noble famille Dagomari), qui la reçut en dot d’une jeune fille de Jérusalem rencontrée au cours d’un voyage en Terre Sainte et avec laquelle il se marierait par la suite: la jeune fille, nommée Maria, était, selon le mythe, la fille d’un prêtre dont la famille avait gardé pendant des siècles la relique, donnée à un ancêtre directement par Saint Thomas. La tradition veut qu’en 1172, le marchand, arrivé à la fin de ses jours, ait voulu laisser la ceinture au promoteur de l’église paroissiale de Santo Stefano (qui deviendra plus tard la cathédrale de la ville): ainsi, l’œuvre serait encore conservée dans le principal lieu de culte de Prato. Ce qui vient d’être raconté est une sorte de fable qui a toujours circulé pour justifier la présence de la ceinture à Prato: il est cependant presque certain que la relique est arrivée sur les rives du Bisenzio au XIIe siècle, période au cours de laquelle sont attestés des contacts fréquents entre la ville toscane et la Terre Sainte, dans le cadre desquels les passages de reliques n’étaient pas rares. Des passages que la dévotion populaire a souvent recouverts du halo légendaire qui nourrira plus tard l’imagination des artistes. Et c’est précisément dans la prédelle de Prato du retable de Bernardo Daddi, que nous retrouvons dans la section suivante de l’exposition, que le mythe de l’arrivée de la ceinture sacrée à Prato est raconté. En bref, les sept scènes restantes racontent le rassemblement des apôtres autour du sépulcre vide de la Vierge montée au ciel, la remise de la ceinture par saint Thomas à un prêtre de Jérusalem (l’ancêtre du beau-père de Michel de Prato), les fiançailles de Michel de Prato avec Marie, la remise de la ceinture à Michel, le voyage de Michel et de sa femme à Prato, l’arrivée de la ceinture dans la ville de Prato, l’arrivée de Michel et de sa femme dans la ville de Prato. le voyage de Michel et de son épouse à Prato, les anges déplaçant Michel du coffre qui contenait la ceinture (le mythe veut que Michel ait dormi dessus chaque nuit, mais qu’il ait été soulevé par deux anges afin de ne pas laisser de poids sur la ceinture), et la remise de la ceinture à l’Uberto proposé.
Il s’agirait de l’une des deux prédelles du retable de l’Assomption: l’autre, conservée à la Pinacothèque vaticane, présente huit histoires de saint Étienne (et huit devaient être à l’origine les scènes de la prédelle aujourd’hui conservée au Museo di Palazzo Pretorio de Prato: le dernier panneau, selon toute vraisemblance, devait représenter l’entrée de la ceinture dans l’église paroissiale de saint Étienne). Peint entre 1337 et 1338, le grand retable de Bernardo Daddi a malheureusement été démembré et l’exposition Legati da una cintola (Liés par une ceinture ) a été l’occasion de réunir les parties conservées et de proposer unehypothèse de reconstruction. Il faut souligner qu’il n’existe pas de documents attestant de liens certains entre les deux prédelles, à tel point que certains spécialistes avaient rejeté l’hypothèse qu’elles appartenaient à la même œuvre, notamment en raison des différences que présentaient certains éléments poinçonnés. Andrea De Marchi, en revanche, a relancé l’hypothèse de l’appartenance au retable de Prato: Bernardo Daddi avait déjà conçu une œuvre similaire (le polyptyque de Santa Reparata), mais il y a aussi d’autres détails qui soutiennent l’idée du conservateur, certains de nature technique (la récurrence de certains éléments dans la punzonature des trois fragments), d’autres de nature iconologique (la présence de la figure de saint Laurent dans la prédelle du Vatican est due au fait que le culte du saint était en vigueur à Prato, et au fait que les scènes ne se concentrent pas sur la vie du saint, Le fait que les scènes ne se concentrent pas sur la vie du saint, mais sur les transformations subies par son corps après son martyre, qui est ensuite arrivé à Rome en provenance de Jérusalem, constituerait pour De Marchi un parallèle avec le voyage de la ceinture, qui est également arrivée en Italie en provenance de Terre Sainte), et d’autres sont de nature historique (dans les fresques du XVe siècle de la chapelle de l’Assomption de la cathédrale de Prato, on trouve une rare représentation de la réunion des corps de saint Étienne et de saint Laurent, qui était déjà présente dans la prédelle vaticane): probable “hommage” au retable de Daddesca).
La mise en scène, qui place les deux prédelles l’une après l’autre, sur un mur voisin de celui où est exposée l’Assomption, permet d’en apprécier pleinement le raffinement et la capacité narrative (cette dernière fait également l’objet de la section de l’exposition qui présente quatre scènes, deux histoires de sainte Cécile et deux de sainte Réparate, appartenant à deux autres prédelles: celles de sainte Réparate faisaient partie du polyptyque susmentionné, peint pour la cathédrale de Florence). Il est difficile de rendre compte d’un seul épisode exemplaire, mais il est également impossible de ne pas souligner l’expressivité gestuelle de la scène de la remise de la ceinture sacrée à Michel de Prato (avec sa belle-mère qui invite son gendre à prendre soin du panier contenant la relique, et le jeune homme de Prato qui, en portant son index au contact de sa poitrine, montre presque de l’incertitude à accepter une tâche aussi exigeante), la délicatesse avec laquelle les anges soulèvent son corps de la poitrine, l’expressivité des apôtres dans la première scène de la prédelle de Prato. Il convient également de noter que la ceinture présente dans toutes les scènes de la prédelle et dans la cuspide avec l’Assomption (la Vierge la remet directement à saint Thomas: nous voyons une partie des mains sur le bord inférieur, tandis que le reste de la figure devait se trouver dans le panneau central manquant) est en fait celle de Prato, en fine laine verte brochée de fils d’or et terminée aux extrémités par des peneri, c’est-à-dire de longues décorations en forme de glands.
Maître de Cabestany, Mort, glorification et assomption de la Vierge avec saint Thomas montrant la ceinture (vers 1160 ; marbre blanc, 205 x 84 x 22 cm ; Cabestany, église Notre-Dame-des-Anges) |
Maître de Cabestany, Mort, Glorification et Assomption de la Vierge avec saint Thomas montrant la ceinture, détail |
Bernardo Daddi, L’Assomption de la Vierge (1337-38 ; tempera et or sur panneau, 113 x 142,6 cm ; New York, The Metropolitan Museum of Art, Robert Lehman Collection) |
Les peintures de prédelles de Bernardo Daddi |
Bernardo Daddi, Histoires de la Sainte Ceinture (1337-1338 ; tempera et or sur panneau, total 27 x 213 cm ; Prato, Musée Palazzo Pretorio) |
Bernardo Daddi, Apôtres autour du tombeau vide de la Vierge et de saint Thomas montrant la ceinture, de la prédelle avec sept scènes de l’Histoire de la ceinture (1337-1338 ; tempera et or sur panneau, total 27 x 213 cm ; Prato, Museo di Palazzo Pretorio) |
Bernardo Daddi, Fiançailles de Michel avec Marie et Mère de la mariée remettant à Michel la corbeille contenant la ceinture en guise de dot, de la prédelle avec sept scènes de l’Histoire de la ceinture (1337-1338 ; tempera et or sur panneau, total 27 x 213 cm ; Prato, Museo di Palazzo Pretorio) |
Bernardo Daddi, Michele spostato dagli angeli e Consegna della cintola al proposto Uberto, de la prédelle avec sept scènes de l’Histoire de la ceinture (1337-1338 ; tempera et or sur panneau, total 27 x 213 cm ; Prato, Museo di Palazzo Pretorio) |
Reconstruction du retable de Bernardo Daddi |
La section suivante se propose de rendre compte de la diffusion du culte de la ceinture sacrée à partir du XIVe siècle, siècle au cours duquel l’iconographie a connu une fortune considérable, se répandant dans toute la Toscane: Cependant, l’une des œuvres les plus intéressantes de l’exposition provient toujours de Prato, à savoir l’ensemble de reliefs en marbre que Niccolò di Cecco del Mercia (documenté entre Sienne et Prato de 1356 à 1360) a réalisé pour la chaire de la cathédrale Saint-Étienne, à partir de laquelle le prêtre montrait la ceinture aux fidèles pendant le rite de l’ostension, qui, comme nous l’apprend Claudio Cerretelli dans le catalogue, est documenté à partir de 1276 (alors que la plus ancienne mention documentaire de la relique remonte à 1255). Il s’agit de quatre scènes représentant les histoires de la Vierge et de la Ceinture: la Dormitio, leCouronnement de la Vierge (cette dernière n’est toutefois pas présente dans l’exposition), la Vierge remettant la Ceinture à saint Thomas et saint Thomas remettant la Ceinture au prêtre de Jérusalem: Il est intéressant de noter, comme le souligne Camila Stefania Amoros dans la notice du catalogue, les points de convergence entre l’œuvre de Niccolò di Cecco del Mercia et le retable de Bernardo Daddi, en particulier dans la figure de la Vierge assise dans une mandorle qui donne la ceinture à un saint Thomas agenouillé et aux mains jointes. Le type iconographique présent chez Daddi et chez Niccolò di Cecco del Mercia connut une diffusion rapide dans les régions de Florence et de Prato (l’iconographie siennoise est différente, comme nous le verrons dans un instant): nous le retrouvons dans plusieurs œuvres exposées au Palazzo Pretorio, à commencer par un retable de Niccolò di Pietro Gerini (Florence, documenté de 1368 à 1414) avec Dormitio Virginis et Assomption, plein de références à d’autres peintures contemporaines (la scène de Dormitio reprend presque littéralement le dossal homologue que Giotto exécuta pour Orsanmichele à Florence, qui est aujourd’hui conservé à Berlin, et il en va de même pour l’Assomption, empruntée à un relief exécuté par Andrea Orcagna, également pour Orsanmichele), et un triptyque également de Niccolò di Pietro Gerini (mais plus tardif et plus raffiné) dans lequel le saint, à la différence de l’œuvre précédente, touche déjà la ceinture que la Vierge lui passe.
En observant les peintures, on remarque de légères variations dans la représentation du passage de la ceinture. Une peinture sur panneau de Lorenzo di Bicci (Florence, documentée de 1370 à avant 1427), provenant de l’église Santo Stefano d’Empoli et aujourd’hui conservée au musée de la Collégiale de la ville toscane, est particulièrement intéressante. Elle crée une sorte de mélange entre l’iconographie de Prato (le saint aux côtés de la Vierge reçoit la ceinture en la touchant ou en la frôlant) et l’iconographie de Sienne (saint Thomas et la Vierge sont dans l’axe et la ceinture plane dans l’air en descendant vers l’apôtre incrédule): on voit ici que le saint s’approche de la Vierge jusqu’à ce qu’il lui arrive sous les genoux, et la Vierge, avant de lui donner la ceinture, semble presque la lui montrer, l’apôtre l’accueillant avec les bras grands ouverts. Une solution que Lorenzo di Bicci a adoptée, comme l’explique Giovanni Giura dans la notice du catalogue, parce qu’elle était “peut-être plus conforme à sa peinture géométrique et à son expressivité refroidie, qui repose plutôt sur la précision et l’élégance du dessin et des éléments décoratifs”. Son fils Bicci di Lorenzo (Florence, 1373 - 1452) lui fera écho, quelques années plus tard, dans le triptyque très coloré de Lastra a Signa, où l’axe vertical entre la Vierge et saint Thomas est presque parfait.
Niccolò di Cecco del Mercia, La Vierge assomptionnée donnant la ceinture à saint Thomas (à gauche: 1359-1360 ; marbre, 100 x 198 cm ; Prato, Museo dell’Opera del Duomo) et Dormitio Virginis (à droite: 1359-1360 ; marbre, 92,5 x 197,5 cm ; Prato, Museo dell’Opera del Duomo). |
Niccolò di Cecco del Mercia, La Vierge assomptionnée donnant la ceinture à saint Thomas (1359-1360 ; marbre, 100 x 198 cm ; Prato, Museo dell’Opera del Duomo) |
Niccolò di Pietro Gerini, Dormitio Virginis et Assomption de la Vierge (vers 1370-1375 ; tempera et or sur panneau, 243 x 202 cm ; Parme, Galerie nationale). Ph. Crédit |
Niccolò di Pietro Gerini, La Vierge assomptionnée donnant la ceinture à saint Thomas et à six anges, entre saint Georges, saint Jean Gualbert, saint Laurent et saint François (vers 1413-1415 ; tempera et or sur panneau, 181 x 199 cm ; Arezzo, Basilique de San Francesco) |
Lorenzo di Bicci, La Vierge assomptionnée donnant la ceinture à saint Thomas et quatre anges (v. 1395-1400 ; tempera et or sur panneau, 146,5 x 81,4 cm ; Empoli, Museo della Collegiata) |
Bicci di Lorenzo, La Vierge assomptionnée donnant la ceinture à saint Thomas avec des anges et des séraphins entre saint Nicolas de Bari, saint André, saint Jean-Baptiste et saint Antoine abbé (vers 1420 ; tempera et or sur panneau, 158 x 178 cm ; Lastra a Signa, Museo di Arte Sacra di San Martino a Gangalandi). |
La seule rencontre avec l’iconographie siennoise offerte par l’exposition (à l’exception du groupe sculptural de Vecchietta représentant l’Assomption, qui n’a pas été conservé dans son intégralité) a lieu devant un panneau de Sano di Pietro (Sienne, 1406 - 1481) que l’on trouve à l’étage supérieur, dans l’avant-dernière salle: l’exposition, il faut le souligner, procède selon une scansion chronologique rigoureuse dont elle ne s’écarte que très rarement. Dans le panneau de Sano di Pietro, la ceinture est presque attrapée par un saint Thomas au centre de la scène, prêt à accueillir de ses mains le don de la Vierge. L’œuvre, qui date d’environ 1445, suit de peu le début de la diffusion de l’iconographie de la ceinture sacrée à Sienne: une diffusion due au fait que Sienne s’enorgueillit également de posséder un fragment de la ceinture de Marie, acquis en 1359 à l’hôpital de Santa Maria della Scala. Les retables du XVe siècle exposés dans la même section, et à peu près contemporains du panneau de Sano di Pietro, montrent qu’ils embrassent le type iconographique de la Madone de Lorenzo di Bicci: c’est le cas de Filippo Lippi (Florence, 1406 - Spolète, 1469), présent avec une œuvre conservée au Palais Pretorio et qui, en raison de certaines différences stylistiques, a probablement été achevée par son atelier. Il s’agit de la peinture sur panneau destinée à l’église du monastère de Santa Margherita: ici aussi, on remarque comment la Madone montre la ceinture à saint Thomas avant de la lui donner. Il s’agit également d’un tableau important pour l’anecdote sur Filippo Lippi car, selon le récit de Vasari, le frère peintre serait tombé amoureux de la jeune Lucrezia Buti, religieuse à Santa Margherita, alors qu’il travaillait sur le retable: dans l’œuvre, Sainte Marguerite (la première à gauche) montrerait les traits de la jeune fille avec laquelle, comme nous le savons, le peintre s’est ensuite enfui (précisément au moment de la représentation de la ceinture). Une approche similaire est celle que Neri di Bicci (Florence, 1418/1420 - 1492), fils et petit-fils de Bicci di Lorenzo (il est intéressant de noter que toute la famille est représentée dans l’exposition), donne au retable aujourd’hui conservé au Museo Diocesano d’Arte Sacra de San Miniato.
C’est la ligne que les représentations du XVIe siècle suivront tout au long du siècle. Simple, mais intense dans son dialogue presque intime entre la Vierge et saint Thomas, le panneau de Ludovico Buti (Florence, vers 1550/1560 - 1611), à qui il a été attribué pour la première fois en 2002, est une œuvre dans laquelle les regards et les gestes “accompagnent le spectateur dans une atmosphère de religiosité sereine” (Rita Iacopino) et qui est influencée par la peinture dévote et contre-réformée de Florence dans la seconde moitié du XVIe siècle. Les références, en particulier, rappellent les atmosphères de Santi di Tito (Sansepolcro, 1536 - Florence, 1603), présentes au Palazzo Pretorio avec une Madone Assumée donnant sa ceinture à Saint Thomas, où même les saints présents participent au moment émotionnel que vit Saint Thomas (les directions visuelles conduisent l’observateur directement vers la ceinture): le climat religieux de l’époque exigeait des œuvres faciles à lire et capables de conduire l’observateur à des sentiments de piété et de dévotion sincères).
L’exposition de Prato se termine par des œuvres qui offrent un témoignage vivant du culte et des ostentations de la ceinture sacrée. Un panneau attribué à Pietro Ciafferi (Pise, 1604 - 1661), qui présente une vue de la cathédrale de Pise pendant l’exposition de la ceinture, est particulièrement intéressant d’un point de vue historique: Cette œuvre inédite représente l’une des plus anciennes vues connues de l’ensemble monumental de la cathédrale de Pise, ici représentée dans un moment de fête, comme le suggèrent les drapeaux pisans hissés sur la façade, la coupole et la tour, ainsi que la “Cintola” elle-même fixée tout autour du monument en signe de dévotion à la Vierge Marie (la coutume de la “Cintola” était typique de la fête de l’Assomption, célébrée le 15 août, mais elle pouvait également être utilisée pour d’autres occasions). Il existe également des peintures représentant l’ostension de la relique: Le tableau de Giovanni Pietro Naldini (Settignano, 1580 - Prato, 1642), situé vers la fin du parcours, est particulièrement intéressant. Il “capture” le moment où la ceinture est présentée aux fidèles par le cardinal Carlo di Ferdinando de Médicis, juste sous la Vierge à l’Enfant de Giovanni Pisano, encore conservée dans la chapelle de la Ceinture (dont le tableau fournit une description précise) et vêtue, selon la coutume en vigueur jusqu’au XXe siècle, d’une cape et d’un diadème brodés. Il est impossible de quitter l’exposition sans avoir vu les trois récipients qui ont accueilli la relique au fil des siècles: la capselle très raffinée de 1447-1448 de Maso di Bartolomeo (Capannole in Val d’Ambra, 1406 - Dubrovnik, 1456), le coffret du XVIIe siècle de Matteo Fattorini (Florence, 1600 - 1678) et la célèbre Teca della Sacra Cintola, réalisée en 1638 par un orfèvre milanais non spécifié et importante en tant que premier récipient transparent, capable de montrer la ceinture aux fidèles sans que le prêtre ait besoin de l’extraire et de la manipuler.
Sano di Pietro, La Vierge assomptionnée parmi les anges musiciens donnant la ceinture à saint Thomas parmi les saints (vers 1445 ; tempera et or sur panneau, 69,3 x 53,5 cm ; Sienne, Pinacoteca Nazionale). |
Sano di Pietro, La Vierge assomptionnée entre des anges musiciens donnant la ceinture à saint Thomas parmi les saints, détail |
Neri di Bicci, La Vierge assomptionnée donnant la ceinture à saint Thomas entre saint Jean-Baptiste et saint Barthélemy (vers 1480 ; tempera et or sur panneau, 176 x 170 cm ; San Miniato, Museo Diocesano d’Arte Sacra) |
Filippo Lippi et son atelier, Notre-Dame de l’Assomption donnant la ceinture à saint Thomas entre saint Grégoire, sainte Marguerite, saint Augustin, l’archange Raphaël et Tobiolo (vers 1456-66 ; tempera et or sur panneau, 199,5 x 191 cm ; Prato, Museo di Palazzo Pretorio) |
Ludovico Buti, Madone donnant la ceinture à saint Thomas (1588-90 ; Prato, Museo di Palazzo Pretorio) |
Pietro Ciafferi, Vue de la cathédrale de Pise pendant l’exposition de la Ceinture (vers 1640-1650 ; huile sur panneau, 32,5 x 39 cm ; Milan et Pesaro, Altomani & Sons) |
Giovanni Pietro Naldini, Exposition de la Sainte Ceinture (vers 1633 ; huile sur toile, 97,5 x 136,5 cm ; Prato, Collection privée) |
Maso di Bartolomeo, Chapelle de la Sainte Ceinture (1447-1448 ; cuivre doré moulé, gaufrage, burin, corne et ivoire sur âme en bois, satin de soie broché d’or, 21,1 x 13,2 x 14,1 cm ; Prato, Museo dell’Opera del Duomo). |
Dans l’ensemble, Legati da una cintola présente plusieurs points forts, une excellente exposition qui, dès son titre, révèle l’intention de reconnaître, dans la relique protagoniste, un élément d’unité pour les citoyens de Prato. Il s’agit d’une exposition de recherche qui laisse le champ libre à de nouvelles contributions (un exemple: la destination du retable de Bernardo Daddi n’est pas encore claire), qui offre un large panorama de l’iconographie de Prato qui s’est ensuite répandue dans toute la région, qui entend dépasser les limites du Palazzo Pretorio (en effet, il convient de souligner que, pendant la durée de l’exposition, le public peut visiter la chapelle de la Ceinture sacrée de la cathédrale de Prato, habituellement fermée, et admirer de près les fresques d’Agnolo Gaddi et la Madone de Giovanni Pisano mentionnée ci-dessus), et qui accorde également une grande importance aux arts dits mineurs, puisque les œuvres d’orfèvrerie, les vêtements liturgiques, les ceintures et les manuscrits enluminés (dont certains remontent au XIIIe siècle) sont mis en valeur par un plan d’exposition et un appareil didactique (concis et surtout efficace pour souligner les aspects les plus importants) qui leur garantissent un poids non inférieur à celui réservé aux peintures ou aux sculptures. Enfin, le catalogue publié par Mandragora est exemplaire: une publication de grande qualité et d’une densité scientifique incontestable qui couronne une exposition à visiter et à même de satisfaire aussi bien les spécialistes que le public.
Avertissement : la traduction en français de l'article original italien a été réalisée à l'aide d'outils automatiques. Nous nous engageons à réviser tous les articles, mais nous ne garantissons pas l'absence totale d'inexactitudes dans la traduction dues au programme. Vous pouvez trouver l'original en cliquant sur le bouton ITA. Si vous trouvez une erreur,veuillez nous contacter.