Je connais mon pays, je le peins": Gustave Courbet et la nature


Compte rendu de l'exposition "Courbet et la nature" à Ferrare, Palazzo dei Diamanti, du 22 septembre 2018 au 6 janvier 2019.

On le voit fier et confiant, regardant l’observateur dans une attitude presque hautaine, en compagnie de son fidèle chien, un épagneul noir. C’est Gustave Courbet (Ornans, 1819 - La Tour-de-Peilz, 1877) lui-même qui est assis au premier plan, habillé en dandy: une élégante redingote noire, un col blanc et un pantalon à carreaux gris témoignent de la classe sociale élevée à laquelle appartenait sa famille, tandis que le chapeau noir à larges bords et la canne recourbée dépassant à gauche du tableau renvoient à son habitude de faire d’interminables promenades au milieu de la nature. Les cheveux longs et la pipe qu’il tient dans sa main droite le désignent comme un membre de la bohème parisienne et le carnet de croquis au dos indique son activité de peintre en plein air, probablement lors de ses fréquentes promenades dans les bois et les vallées de sa région natale, la Franche-Comté.

À l’arrière-plan, on aperçoit derrière lui une paroi rocheuse et, plus loin, une vallée. Dans ce tableau, peint en 1842 et aujourd’hui conservé au musée des Beaux-Arts de Paris, Courbet semble fier de faire partie du paysage qui l’entoure, qui n’est autre que sa terre natale, et révèle à travers son art une part très importante de son autobiographie: son lien viscéral avec la nature et surtout avec ses lieux d’origine.



C’est donc Courbet lui-même qui introduit les visiteurs à l’exposition que le Palazzo dei Diamanti de Ferrare lui consacre jusqu’au 6 janvier 2019, Courbet et la nature. Comme nous l’avons dit, il le fait à travers son Autoportrait, un genre peu fréquenté par les artistes français jusqu’à la moitié du XIXe siècle, mais au contraire pratiqué à plusieurs reprises par Courbet (entre 1842 et 1855, il en a peint une vingtaine), soulignant déjà dans cet aspect son caractère révolutionnaire et à contre-courant. En outre, il s’agit d’une œuvre particulièrement significative dans son activité picturale, puisqu’elle est, en 1844, la première toile de l’artiste acceptée au Salon et donc le premier succès public du peintre qui n’a que 25 ans. Les paysages du tableau, c’est-à-dire les rochers, les forêts, les vallées, typiques de la Franche-Comté, ne quitteront jamais l’âme du peintre: on les retrouvera dans d’innombrables tableaux, même dans ceux réalisés à l’étranger, lors de ses séjours. Chaque paysage qu’il représente devient une autobiographie, dans laquelle il invite le spectateur à connaître la partie la plus intime de lui-même, au-delà de son caractère bien trempé.

L’originalité de son art paysager réside dans son refus de considérer la nature environnante et le paysage comme des éléments à part entière, mais plutôt amalgamés et contextualisés à la biographie du peintre et aux personnages représentés. Le paysage et l’homme ou l’animal sont toujours liés l’un à l’autre. Même en l’absence de présence humaine ou animale, comme dans le tableau de la salle d’introduction représentant lechêne de Flagey, également appelé chêne de Vercingétorix, le caractère autobiographique est perceptible: l’imposant chêne représenté solidement ancré dans la terre se nourrit de la force du sol franc-comtois, comme il le fait pour Courbet lui-même. La présence, presque imperceptible par rapport à la majesté de l’arbre, d’un chien poursuivant un lièvre, anticipe pour le visiteur sa passion pour l’art de la chasse, auquel la dernière salle de l’exposition est consacrée, comme nous le verrons. Par ailleurs, la forte personnalité du peintre, révolutionnaire pour son époque, se comprend si l’on considère combien la peinture de paysage était marginale pour les artistes qui l’ont précédé ou qui lui sont contemporains: considéré comme un genre mineur par les académiciens, Courbet en a fait un motif significatif de son art. Enfin, le Chêne de Vercingétorix prend une signification historique et à nouveau révolutionnaire, puisque Napoléon III et ses partisans situent en Bourgogne la célèbre bataille d’Alésia entre Gaulois et Romains livrée en 52 av. J.-C., alors que Courbet affirme avec ce tableau sa conviction que la bataille s’est déroulée en Franche-Comté: un doute provoqué par le litige entre Alise Sainte-Reine, en Côte d’Or, et Alaise près de Flagey, en Franche-Comté.

Une salle de l'exposition Courbet et la nature
Une salle de l’exposition Courbet et la nature


Une salle de l'exposition Courbet et la nature
Une salle de l’exposition Courbet et la nature. Ph. Crédit Finestre Sull’Arte


Une salle de l'exposition Courbet et la nature
Une salle de l’exposition Courbet et la nature. Ph. Crédit Finestre Sull’Arte


Une salle de l'exposition Courbet et la nature
Une salle de l’exposition Courbet et la nature


Gustave Courbet, Autoportrait au chien noir (1842 ; huile sur toile, 46,5 x 55,5 cm ; Paris, Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris)
Gustave Courbet, Autoportrait au chien noir (1842 ; huile sur toile, 46,5 x 55,5 cm ; Paris, Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris)


Gustave Courbet, Le chêne de Flagey (1864 ; huile sur toile, 89 x 111,5 cm ; Ornans, Musée départemental Gustave Courbet)
Gustave Courbet, Le chêne de Flagey (1864 ; huile sur toile, 89 x 111,5 cm ; Ornans, Musée départemental Gustave Courbet)

En poursuivant avec les autoportraits, le visiteur en trouvera un autre dans la salle suivante, consacrée aux “cartes postales” de Franche-Comté. Il s’agit de L’Homme blessé: au premier plan, Courbet lui-même, allongé et adossé au tronc d’un grand arbre, a les yeux fermés et une blessure à la poitrine qui a taché de sang sa chemise blanche entrouverte. Une épée dépasse à côté de lui. Il s’agit d’un tableau fortement influencé par le romantisme allemand et français, puisque la radiographie montrait au premier plan le peintre et sa bien-aimée, tendrement endormis et enlacés. La composition actuelle, résultat d’une modification par l’artiste lui-même, date de 1854, lorsque Courbet avait découvert que sa bien-aimée et la mère de son fils, Virginie Binet, s’étaient mariées. Il s’agit donc d’une blessure sentimentale.

La même année, s’adressant à son ami et mécène Alfred Bruyas, Courbet déclare que dans sa vie il a fait plusieurs portraits de lui-même, selon sa situation spirituelle, c’est comme s’il avait écrit son autobiographie.

Fier de sa patrie, l’artiste prononçait presque une maxime de son art: “Pour peindre un paysage, il faut le connaître. Je connais mon pays, je le peins”. Les tableaux représentant la Franche-Comté sont en effet nombreux, et dans cette deuxième salle, le visiteur se trouve plongé dans les paysages les plus évocateurs de cette partie de la France, entre forêts, montagnes, plateaux, rivières, vallées ; une région entièrement dominée par la nature. Le premier tableau qui peut être considéré comme l’initiateur de ce thème est La vallée de la Loue sous un ciel d’orage: présente dans l’exposition, l’œuvre fascine par sa composition, car elle est clairement coupée en deux parties distinctes. Dans la partie inférieure, l’élément rocheux est lié à l’élément forestier, composé d’une riche variété de verts et de bruns soulignant les contours des arbres et des arbustes ; on trouve également, au centre, bien camouflées dans l’environnement, deux figures humaines accompagnées d’un chien accroupi derrière elles. La partie supérieure de l’œuvre, en revanche, est entièrement occupée par le ciel, dont la couleur plombée annonce l’arrivée d’une grande tempête. Cette toile sera suivie de nombreuses variantes à partir de 1855, comme Paysage près de Maisières et Paysage à Ornans, où la coexistence des roches dominantes et de la végétation persiste, et dans les tableaux que Courbet réalise loin d’Ornans, dans les dernières années de sa vie, comme Vallée de la Loue, près d’Ornans et Pommiers du pè;re... Courbet à Ornans, ce dernier se caractérisant par la présence au premier plan de quelques pommiers au feuillage luxuriant parsemé de taches jaune verdâtre et d’un ciel non pas complètement dégagé, mais avec des nuages grisâtres qui s’annoncent.

Gustave Courbet, L'homme blessé (1844-1854 ; huile sur toile, 81,5 x 97,5 cm ; Paris, musée d'Orsay)
Gustave Courbet, L’Homme blessé (1844-1854 ; huile sur toile, 81,5 x 97,5 cm ; Paris, musée d’Orsay)


Gustave Courbet, Paysage près de Maisières (1865 ; huile sur toile, 50 x 65 cm ; Munich, Neue Pinakothek)
Gustave Courbet, Paysage près de Maisières (1865 ; huile sur toile, 50 x 65 cm ; Munich, Neue Pinakothek)


Gustave Courbet, Paysage d'Ornans (1855-1860 ; huile sur toile, 65 x 81 cm ; Vienne, Gemäldegalerie der Akademie der bildenden Künste)
Gustave Courbet, Paysage à Ornans (1855-1860 ; huile sur toile, 65 x 81 cm ; Vienne, Gemäldegalerie der Akademie der bildenden Künste)


Gustave Courbet, La vallée de la Loue sous un ciel d'orage (vers 1849 ; huile sur toile, 54 x 65 cm ; Strasbourg, musée des Beaux-Arts)
Gustave Courbet, La vallée de la Loue sous un ciel d’orage (vers 1849 ; huile sur toile, 54 x 65 cm ; Strasbourg, musée des Beaux-Arts)


Gustave Courbet, Vallée de la Loue près d'Ornans (1872 ; huile sur toile, 80 x 100 cm ; Bristol, Bristol Museums & Art Gallery)
Gustave Courbet, Vallée de la Loue près d’Ornans (1872 ; huile sur toile, 80 x 100 cm ; Bristol, Bristol Museums & Art Gallery)


Gustave Courbet, Les pommiers du père Courbet à Ornans (1873 ; huile sur toile, 45 x 54,5 cm ; Rotterdam, Museum Boijmans van Beuningen)
Gustave Courbet, Les pommiers du père Courbet à Ornans (1873 ; huile sur toile, 45 x 54,5 cm ; Rotterdam, Museum Boijmans van Beuningen)

Comme nous l’avons vu précédemment, le paysage n’est pas pour Courbet un élément de second plan, comme c’est le cas dans la peinture académique, mais il est profondément lié aux éventuelles figures d’hommes et d’animaux: l’une est considérée par lui comme un complément des autres. Cela est clairement visible dans certaines œuvres de l’exposition, comme Caprioli alla fonte (Chevreuil à la source), où deux chevreuils se baignent joyeusement dans l’eau qui coule entre un paysage à nouveau composé de rochers et d’arbres, et un autre chevreuil au premier plan, qui regarde l’observateur d’un œil vif ; l’animal amical est encore à l’ombre des voûtes des arbres, mais il est prêt à plonger avec ses autres congénères dans l’eau fraîche. C’est également ce que l’on peut voir dans deux tableaux très frappants où l’eau et la figure humaine interagissent dans un paysage verdoyant: La source ou la baigneuse à la source et La jeune baigneuse. Dans le premier, une silhouette féminine, nue, de dos et les cheveux relevés, s’appuie sur un rocher. La jeune femme sensuelle s’accroche d’une main aux branches feuillues d’un arbre, tandis qu’elle laisse couler l’eau de la source dans son autre main ouverte ; ses pieds sont immergés dans l’eau transparente. Dans le second tableau, en revanche, nous voyons une jeune femme nue aux formes généreuses tremper sensuellement son orteil dans l’eau qui coule à travers la forêt. Elle s’accroche d’une main à la branche d’un arbre et se touche les cheveux de l’autre. On remarque également dans ce tableau une expression absorbée et contemplative. Courbet, dans ces deux tableaux, aborde le thème du nu immergé dans la nature: cependant, il ne le charge pas des références mythologiques de la tradition, mais en fait une représentation du plaisir sensuel au contact des éléments naturels. Les mystères féminins sont ainsi associés par l’artiste aux mystères de la nature, en relation avec le caractère originel de l’un et de l’autre.

Deux jeunes filles, représentées ensemble, sont les protagonistes d’une autre grande œuvre, intitulée Vierges au bord de la Seine. Celle-ci fut sévèrement critiquée en 1857 au Salon en raison de sa taille monumentale, généralement typique des représentations historiques, bibliques et mythologiques, et de la sensualité émanant des deux figures féminines. Un tableau laid et vulgaire, selon Théophile Gautier, qui le décrit ainsi: “Deux grandes figures, à qui c’est un compliment de les appeler femmes faciles, sont couchées sur l’herbe [...] avec un très mauvais goût et semblent cuver le vin dont on arrose les fritures dans les tavernes d’Asniéres”. Dans cet immense tableau (174 x 206 cm), Courbet représente deux jeunes filles allongées sur l’herbe, au bord de la Seine, un jour d’été. L’une, absorbée dans ses pensées, se tient la tête avec la main et serre dans l’autre un gros bouquet de fleurs ; l’autre est complètement allongée, fixant le spectateur avec des yeux mi-clos. Les vêtements qu’elles portent révèlent qu’elles n’appartiennent pas à la bonne société: la première porte une robe rouge, des gants de dentelle noire, un bracelet de perles rouges et un grand chapeau sur la tête ; la seconde porte un jupon et un corset. Les deux jeunes filles ont été interprétées par de nombreux critiques comme des prostituées ou envisagées comme une liaison homosexuelle, mais Courbet semble s’être inspiré d’un roman de George Sand, Lélia, dans lequel deux sœurs s’interrogent sur l’amour et la sensualité. Au-delà, l’artiste représente ici les divertissements en plein air de la nouvelle société industrielle, anticipant un thème très cher aux impressionnistes. Le tableau a été exécuté à Paris, où le peintre s’est installé à la fin de l’année 1839, et a ainsi eu l’occasion d’entrer en contact avec la société parisienne, bien différente de la réalité provinciale dont il était issu.

Gustave Courbet, Chevreuil au printemps (1868 ; huile sur toile, 97,5 x 129,8 cm ; Fort Worth, Kimbell Art Museum)
Gustave Courbet, Chevreuil au printemps (1868 ; huile sur toile, 97,5 x 129,8 cm ; Fort Worth, Kimbell Art Museum)


Gustave Courbet, Baigneur à la fontaine (1868 ; huile sur toile, 128 x 97 cm ; Paris, musée d'Orsay)
Gustave Courbet, Baigneuse à la source (1868 ; huile sur toile, 128 x 97 cm ; Paris, Musée d’Orsay)


Gustave Courbet, Jeune baigneuse (1866 ; huile sur toile, 130,2 x 97,2 cm ; New York, Metropolitan Museum)
Gustave Courbet, Jeune baigneuse (1866 ; huile sur toile, 130,2 x 97,2 cm ; New York, Metropolitan Museum)


Gustave Courbet, Demoiselles au bord de la Seine (1856-1857 ; huile sur toile, 174 x 206 cm ; Paris, Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris)
Gustave Courbet, Demoiselles au bord de la Seine (1856-1857 ; huile sur toile, 174 x 206 cm ; Paris, Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris)

Un autre aspect à prendre en compte est que Courbet peignait en plein air, comme en témoigne le carnet de croquis de l’Autoportrait exposé dans la première salle: ce sont surtout les paysages qu’il a peints sur place et qu’il a peut-être retouchés ensuite dans son atelier. En témoignent les deux versions du Puits noir dans la vallée de la Loue: l’une datant de 1855 et conservée à la National Gallery of Art de Washington, l’autre de 1865 et conservée au musée des Augustins de Toulouse. Une salle entière est consacrée aux sources de la Loue et de son affluent le Lison: ces œuvres se caractérisent par une cavité karstique sombre au centre du tableau, d’où s’écoule l’eau de la source. Amateur de promenades dans la nature, notamment dans les bois de son Ornans, Courbet représente ces grottes et ces sources qu’il a vécues et qu’il connaît bien, et il introduit aussi dans leur représentation le sentiment d’inquiétude qu’il a éprouvé en les découvrant. La source du Lison, la grotte de la Sarrazine et la source de la Loue en sont des exemples. Dans cette dernière œuvre, il introduit un petit pêcheur qui se tient au centre de la composition sur un barrage qui détourne l’eau vers un moulin. Le personnage est minuscule par rapport à l’énorme cavité sombre qui occupe tout le tableau et à la majestueuse voûte de calcaire, rendue avec réalisme par Courbet grâce à la technique de la spatule: en étalant directement les couleurs sur la toile à l’aide de la spatule, l’artiste a pu reproduire la composition matérielle du calcaire.

Outre ses longues promenades dans les forêts et les vallées de Franche-Comté, Courbet aime voyager: pour l’artiste, les voyages sont un motif de découverte de nouveaux scénarios naturels qu’il peut représenter dans ses tableaux. À partir de 1854, il effectue de longs séjours dans le sud de la France, entrant ainsi en contact avec la Méditerranée. Il séjourne également à Fontainebleu et effectue plusieurs séjours en Hollande, en Belgique, en Allemagne et en Suisse. C’est sur les rives de la Méditerranée qu’il rencontre en 1853 Alfred Bruyas, un jeune collectionneur expérimenté de Montpellier. Tous deux se lient immédiatement d’amitié et Bruyas devient son mécène. La rencontre de Courbet avec Bruyas sera fondamentale pour sa carrière artistique et est bien illustrée par l’imposant tableau de l’exposition La Rencontre ou Bonjour Monsieur Courbet: les deux personnages se font face sur fond de sud de la France ; Bruyas n’est pas seul, mais accompagné de son serviteur Calas et de son chien. La représentation même de chacun des deux personnages principaux semble significative car elle définit au premier coup d’œil d’où ils viennent: Courbet porte un sac à dos sur les épaules, un bâton de montagne dans la main droite et un chapeau dans la main gauche ; des vêtements qui rappellent immédiatement le paysage montagnard. En revanche, Bruyas porte les vêtements d’un citoyen bourgeois. On pourrait parler d’ une rencontre entre le monde montagnard et le monde marin de la Méditerranée.

Lors d’un séjour en Saintonge, ancienne province du centre de la France, Courbet fait la connaissance de Jean-Baptiste Camille Corot (Paris, 1796 - 1875), qu’il connaît déjà. L’intérêt et la volonté de renouveler la peinture de paysage en se rapprochant de plus en plus d’une représentation réaliste de la nature, notamment en ce qui concerne les éléments matériels, se retrouvent dans le dialogue entre deux tableaux des deux artistes: Le Rocher croulant de Courbet , étude géologique, et Fontainebleu de Jean-Baptiste Camille Corot, mine désaffectée, où dans les deux cas c’est la roche qui domine.

Gustave Courbet, Le ruisseau du Puits noir (1855 ; huile sur toile, 104 x 137 cm ; Washington, National Gallery)
Gustave Courbet, Le ruisseau du Puits noir (1855 ; huile sur toile, 104 x 137 cm ; Washington, National Gallery)


Gustave Courbet, Le ruisseau du Puits noir (1865 ; huile sur toile, 80 x 100 cm ; Toulouse, musée des Augustins)
Gustave Courbet, Le ruisseau du Puits noir (1865 ; huile sur toile, 80 x 100 cm ; Toulouse, Musée des Augustins)


Gustave Courbet, La source du Lison (1864 ; huile sur toile, 54 x 45 cm ; collection privée)
Gustave Courbet, La source du Lison (1864 ; huile sur toile, 54 x 45 cm ; collection particulière)


Gustave Courbet, La grotte Sarrazine (1864 ; huile sur toile, 46 x 55 cm ; Lons-le-Saunier, musée des Beaux-Arts)
Gustave Courbet, La grotte Sarrazine (1864 ; huile sur toile, 46 x 55 cm ; Lons-le-Saunier, musée des Beaux-Arts)


Gustave Courbet, La Source de la Loue (1864 ; huile sur toile, 98,4 x 130,4 cm ; Washington, National Gallery)
Gustave Courbet, La Source de la Loue (1864 ; huile sur toile, 98,4 x 130,4 cm ; Washington, National Gallery)


Gustave Courbet, La réunion ou Bonjour Monsieur Courbet (1854 ; huile sur toile, 132,4 x 151 cm ; Montpellier, Musée Fabre)
Gustave Courbet, La Réunion ou Bonjour Monsieur Courbet (1854 ; huile sur toile, 132,4 x 151 cm ; Montpellier, Musée Fabre)


Gustave Courbet, Rocher éboulé, étude géologique (1864 ; huile sur toile, 59,7 x 73 cm ; Salins-les-Bains, Grande Saline)
Gustave Courbet, Rocher éboulé, étude géologique (1864 ; huile sur toile, 59,7 x 73 cm ; Salins-les-Bains, Grande Saline)


Jean-Baptiste Camile Corot, Fontainebleu, mine abandonnée (1850 ; huile sur papier collé sur toile, 29 x 43 cm ; La Haye, De Mesdag Collectie)
Jean-Baptiste Camile Corot, Fontainebleu, mine abandonnée (1850 ; huile sur papier marouflé sur toile, 29 x 43 cm ; La Haye, De Mesdag Collectie)

Cependant, deux salles entières de l’exposition sont consacrées aux paysages marins. Celles-ci peuvent être divisées en deux séries: Vagues et Marines. Toutes deux ont été exécutées entre 1865 et 1869, alors que l’artiste séjournait longuement en Normandie, dans le nord de la France, dans des lieux très souvent peints par la nouvelle génération d’artistes, les impressionnistes: les paysages du Havre, d’Étretatet d’autres villes environnantes. L’océan a par nature un caractère plus fort et plus décisif que la mer: les fréquentes tempêtes, parfois violentes, sont caractérisées par les grandes vagues écumantes et le ciel qui change brusquement de couleur, s’assombrissant au fur et à mesure que la tempête approche. Tous ces éléments sont les protagonistes de la série Vagues: l’un des exemples les plus frappants exposés est laVague conservée aux National Galleries of Scotland à Édimbourg. Au premier plan, une grande houle s’élance vers le ciel qui s’assombrit, permettant au spectateur de voir distinctement chaque petit coup de pinceau, réalisé avec de la couleur imprimée directement sur la toile à la manière impressionniste, formant l’écume blanche qui l’envahit. À côté des différentes variations sur le thème, on remarque une œuvre dans laquelle Courbet modifie la composition en ajoutant une barque de pêcheur au premier plan sur le rivage. Ce tableau, exécuté en 1870 et conservé au musée des Beaux-Arts d’Orléans, est à rapprocher de laVague du Havrede 1869, où l’on trouve deux barques et où les tons sont beaucoup plus sombres.

En revanche, la série Marine s’inspire de moments paisibles où la mer est calme. Le splendide tableau Coucher de soleil: plage de Trouville attire le regard. Des coups de pinceau richement colorés font scintiller la mer sous un ciel légèrement rougissant ; au loin, une petite voile. Particulier et unique dans la production de Courbet est le tableau intitulé Les lévriers du comte de Choiseul: l’œuvre a été peinte par l’artiste durant l’été 1866 à Deauville et représente ici les deux beaux lévriers du comte chez qui il séjournait ; les deux animaux au premier plan, représentés en perspective à leur hauteur, ont des lignes bien définies qui se détachent sur le fond composé de la mer et du ciel, éléments clairement séparés par un large horizon.

Gustave Courbet, La vague (vers 1869 ; huile sur toile, 46 x 55 cm ; Édimbourg, National Galleries of Scotland)
Gustave Courbet, La Vague (vers 1869 ; huile sur toile, 46 x 55 cm ; Édimbourg, National Galleries of Scotland)


Gustave Courbet, La vague (1869 ; huile sur toile, 71,5 x 116,8 cm ; Le Havre, Musée d'art moderne André Malraux)
Gustave Courbet, La Vague (1869 ; huile sur toile, 71,5 x 116,8 cm ; Le Havre, Musée d’art moderne André Malraux)


Gustave Courbet, Coucher de soleil: plage de Trouville (vers 1866 ; huile sur toile, 71,5 x 102,3 cm ; Hartford, Wadsworth Atheneum Museum of Art)
Gustave Courbet, Coucher de soleil: plage de Trouville (vers 1866 ; huile sur toile, 71,5 x 102,3 cm ; Hartford, Wadsworth Atheneum Museum of Art)


Gustave Courbet, Les lévriers du comte de Choiseul (1866 ; huile sur toile, 89,5 x 116,5 cm ; Saint Louis, Saint Louis Art Museum)
Gustave Courbet, Les lévriers du comte de Choiseul (1866 ; huile sur toile, 89,5 x 116,5 cm ; Saint Louis, Saint Louis Art Museum)

Les dernières années de sa vie et de son activité artistique sont marquées par un sentiment nostalgique et presque romantique à l’égard de ses lieux d’origine: en 1873, Courbet est contraint de choisir l’exil, et donc de ne jamais revenir dans sa patrie, afin d’éviter une nouvelle fois la prison. Se rapprochant des idées socialistes et anarchistes suite à son éternelle rancœur envers l’impérialisme et Napoléon III, il est élu au Conseil de la Commune, le gouvernement qui autogère Paris de mars à mai 1871. Pour cela et pour son discours dans lequel il se prononce en faveur de la destruction de la colonneVendôme, monument en hommage aux victoires militaires de Napoléon Ier, qui sera effectivement détruite en 1872, il est arrêté et condamné d’abord à six mois de prison, puis à deux ans, avec en plus la confiscation de ses biens. Il s’installe alors définitivement à La Tour-de-Peilz, sur le lac Léman, en Suisse. Il y peint des vues du lac Léman et du château de Chillon, ainsi que des vues des Alpes. Ce sont des paysages avec des ciels nuageux ou rouges pour le coucher du soleil qui accentuent la vision des sentiments et de l’intériorité de l’artiste mélancolique.

Se souvenant des Marinas peintes lors de ses séjours en Normandie, il réalise plusieurs œuvres sur le lac Léman, dans des situations lumineuses particulières: au crépuscule, au coucher du soleil et sous un ciel nuageux. Le Panorama des Alpes est merveilleusement évocateur: la majesté des sommets enneigés et l’habileté remarquable dans la représentation de la matière rocheuse rappellent les paysages de montagne qu’il a peints en Franche-Comté.

La dernière salle de l’exposition est entièrement consacrée à la chasse, poursuivant la veine de l’interpénétration dans un même tableau du paysage, des animaux et parfois même des hommes. Courbet avait pratiqué l’art de la chasse dans son Ornans, qui le fascinait beaucoup, et il reproduit ce thème sur la toile avec l’intention d’une double fidélité au réalisme qu’il professait, en tant que chasseur expert, et à la grande tradition picturale des maîtres flamands du XVIIe siècle ou des artistes anglais contemporains. De dimensions monumentales (220 x 275 centimètres) se trouve le tableau le plus dramatique de la salle: Le cerf dans l’eau. En poussant un cri vers le ciel, le cerf s’élance dans la rivière, se dirigeant vers une mort certaine ; la scène dramatique est accentuée par le paysage environnant qui semble vaste mais désolé et par un ciel qui, par la couleur des nuages, annonce une tempête. Une expression similaire, avec la bouche grande ouverte, se retrouve chez le cerf au sol, maintenant tué, dans le tableau Le chasseur allemand.

Le thème de la chasse dans la neige est magistralement abordé, les chasseurs étant tantôt des hommes accompagnés de leurs fidèles animaux, tantôt les animaux eux-mêmes qui, suivant les lois de la nature, cherchent leur nourriture. Le Chasseur à cheval, suivant la piste, et le Renard dans la neige en sont des exemples. Le premier représente un homme bien emmitouflé pour affronter le froid, mais à l’expression fatiguée et mélancolique, probablement due à une longue journée de chasse qui n’a pas donné grand-chose, et son cheval. Ce dernier a le dos voûté et tente de flairer les empreintes de sa proie blessée. Les traces de pas tachées de sang dans la neige indiquent au spectateur qu’un animal blessé se trouve non loin de la scène représentée, mais on ne sait pas exactement lequel. Les tons du tableau sont plutôt sombres, indiquant que la longue journée touche à sa fin et que les nuages dans le ciel se rapprochent ; même la neige n’apparaît pas blanche, mais d’une couleur tirant sur le gris. Ce tableau est influencé par les expériences de chasse de Courbet lui-même, un chasseur passionné qui passait l’automne dans son Ornans pour ne pas manquer la saison de la chasse, et qui le faisait sans chien.

Le second tableau représente au premier plan un beau renard , tout recroquevillé, la queue dirigée vers le haut, désireux de savourer le succès de sa chasse: d’une patte, il tient une souris, sa proie, et des brins de chair de cette dernière jaillissent de sa gueule.

Contrairement au tableau précédent, la neige est blanche et le paysage peut certainement être qualifié de boisé: on aperçoit des rochers et de petits buissons, également recouverts de neige. En revanche, le tableau intitulé Le refuge du chevreuil en hiver semble plus pittoresque et tranquille: au milieu de grands arbres enneigés formant une forêt et d’une douce couche de neige blanche recouvrant le sol, trois chevreuils se tiennent au centre de la toile, deux d’entre eux étant accroupis au repos et un autre semblant explorer l’environnement dans lequel il s’est réfugié.

Gustave Courbet, Lac Léman au crépuscule devant Bon-Port (1876 ; huile sur toile, 59,5 x 80 cm ; collection privée)
Gustave Courbet, Lac Léman au crépuscule devant Bon-Port (1876 ; huile sur toile, 59,5 x 80 cm ; Collection particulière)


Gustave Courbet, Coucher de soleil sur le lac Léman (1874 ; huile sur toile, 54,5 x 65,4 cm ; Vevey, Musée Jenisch)
Gustave Courbet, Coucher de soleil sur le lac Léman (1874 ; huile sur toile, 54,5 x 65,4 cm ; Vevey, Musée Jenisch)


Gustave Courbet, Lac Léman sous un ciel nuageux (1874 ; huile sur toile, 38 x 55,5 cm ; Londres, National Gallery)
Gustave Courbet, Lac Léman sous un ciel nuageux (1874 ; huile sur toile, 38 x 55,5 cm ; Londres, National Gallery)


Gustave Courbet, Panorama des Alpes (vers 1876 ; huile sur toile, 64 x 140 cm ; Genève, Musées d'art et d'histoire)
Gustave Courbet, Panorama des Alpes (vers 1876 ; huile sur toile, 64 x 140 cm ; Genève, Musées d’art et d’histoire)


Gustave Courbet, Cerf dans l'eau (1861 ; huile sur toile, 220 x 275 cm ; Marseille, musée des Beaux-Arts)
Gustave Courbet, Cerf dans l’eau (1861 ; huile sur toile, 220 x 275 cm ; Marseille, musée des Beaux-Arts)


Gustave Courbet, Le chasseur allemand (1859 ; huile sur toile, 119 x 177 cm ; Lons-le-Saunier, musée des Beaux-Arts)
Gustave Courbet, Le chasseur allemand (1859 ; huile sur toile, 119 x 177 cm ; Lons-le-Saunier, musée des Beaux-Arts)


Gustave Courbet, Chasseur à cheval (1863-1864 ; huile sur toile, 119,4 x 95,3 cm ; New Haven, Yale University Art Gallery)
Gustave Courbet, Chasseur à cheval (1863-1864 ; huile sur toile, 119,4 x 95,3 cm ; New Haven, Yale University Art Gallery)


Gustave Courbet, Renard dans la neige (1860 ; huile sur toile, 85,7 x 128 cm ; Dallas, Dallas Museum of Art)
Gustave Courbet, Renard dans la neige (1860 ; huile sur toile, 85,7 x 128 cm ; Dallas, Dallas Museum of Art)


Gustave Courbet, Le refuge du chevreuil en hiver (1866 ; huile sur toile, 54,1 x 72,8 cm ; Lyon, musée des Beaux-Arts)
Gustave Courbet, Le refuge du chevreuil en hiver (1866 ; huile sur toile, 54,1 x 72,8 cm ; Lyon, Musée des Beaux-Arts)

Ainsi s’achève un parcours d’exposition, argumenté par des dispositifs didactiques, qui vise à présenter un thème peu connu du grand public et peu traité dans les expositions consacrées à des artistes dont l’art est pourtant imprégné du rapport à la nature, comme c’est le cas pour Gustave Courbet. Le visiteur, à l’issue de la rétrospective, aura compris combien la terre natale a été fondamentale pour l’artiste tout au long de sa carrière et combien le caractère de l’artiste est sensible au plus profond de lui-même. Courbet et la nature est donc une exposition bien comprise, soigneusement conçue et aménagée pour permettre à chacun de se plonger dans un aspect très significatif de l’artiste français.

L’exposition est accompagnée d’un catalogue contenant des essais sur l’importance du paysage pour Courbet, sur le fait que pour l’artiste la nature n’était pas simplement un décor sur lequel dépeindre ses personnages, mais plutôt comment il a abordé ce thème d’une manière innovante et révolutionnaire par rapport à ses contemporains, et sur l’héritage moderne de Courbet.


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