Cette jeune fille le fixe de ses yeux liquides et de sa bouche entrouverte, tout en rayonnant de pureté, attirant tous les regards sur elle. Sa peau douce et lisse est aussi immaculée que la surface de sa grande boucle d’oreille en forme de larme. Telle une vision émanant des ténèbres, elle n’appartient à aucun temps ni lieu précis. Son turban exotique, qui enveloppe sa tête d’un bleu cristallin, est surmonté d’un tissu jaune frappant qui tombe spectaculairement derrière son épaule, conférant un air de mystère à l’image.
La datation de cette image extraordinaire s’est avérée difficile, non seulement parce que le costume n’a aucun parallèle avec la mode néerlandaise contemporaine, mais aussi parce que le tableau est très différent, sur le plan conceptuel, des scènes de genre de Vermeer de la fin des années 1950 et du début des années 1960. La tentative de dater le tableau des années 1970 en identifiant le modèle à Maria, l’aînée des enfants de Vermeer, n’est pas convaincante. Dans aucune de ses peintures des années 1970, Vermeer n’obtient les tons chair doucement diffusés que l’on voit ici, créés par la superposition d’une fine couche de peinture couleur chair sur un modelé transparent. Vermeer a développé cette technique de rendu des tons chair au milieu des années 1960 [...] et l’a exploitée dans La jeune fille à l’oreille de perle, en l’utilisant de manière encore plus audacieuse et expressive. Le contour doux du visage de la jeune fille diffuse une chaleur qui imprègne l’image. Pour animer son visage, Vermeer a placé des accents légers dans ses yeux et, comme l’a révélé la restauration du tableau en 1994, a accentué les extrémités de sa bouche avec de petits points de peinture rose. L’application libre et étonnamment audacieuse de l’émail bleu dans le turban contribue également à l’impression d’immédiateté.
Le caractère expressif de l’application picturale de Vermeer est surprenant, compte tenu du soin avec lequel il dessinait ses œuvres. Elle éloigne également son style de celui de plusieurs de ses contemporains, dont Frans van Mieris, qui peignait des sujets comparables, mais d’une manière méticuleuse ancrée dans une tradition totalement différente. La manière large de Vermeer de généraliser les formes et de suggérer les nuances subtiles de la lumière tombant sur les surfaces est un aspect fondamental de son classicisme, dont les origines peuvent être retracées dans ses peintures de sujets historiques. La Jeune fille à la perle montre un autre aspect du classicisme qui imprègne l’œuvre de Vermeer [...] : l’intemporalité. Sur un fond sombre et indéfini, vêtue d’un costume exotique, cette jeune femme saisissante ne peut être placée dans aucun contexte spécifique. Elle ne possède aucun attribut qui pourrait, par exemple, l’identifier comme une figure allégorique, qu’il s’agisse d’une muse ou d’une sibylle. Cependant, il est presque certain que c’est précisément cette absence de contexte historique ou iconographique qui confère une telle immédiateté à tous ceux qui la regardent.
Bien que cette œuvre partage des relations fondamentales avec les autres peintures de Vermeer, elle est néanmoins différente à bien des égards. C’est la première à se concentrer sur une seule figure sur un fond sombre. L’échelle de la tête est plus grande et l’image est plus proche du plan du tableau que dans toute autre scène de ce type. Bien qu’il soit tout à fait possible que Vermeer soit parvenu seul à cette solution de composition, les liens stylistiques avec les peintures de Michael Sweerts sont si frappants qu’il convient d’évoquer la possibilité d’un contact entre ces deux artistes, d’autant plus que Sweerts vivait à Amsterdam en 1660-1661. Sweerts, qui avait été assistant à l’Accademia di San Luca à Rome et qui avait fondé une académie de dessin d’après nature à Bruxelles après son retour dans sa ville natale vers 1656, partageait avec Vermeer l’idée de donner une dignité classique à des scènes de la vie quotidienne. Pendant son séjour à Amsterdam, Sweerts a peint une série de bustes de jeunes gens aux profils tout aussi purs sur des fonds sombres et indéfinis. Tous regardent le tableau avec des yeux humides et brillants, et au moins l’un d’entre eux porte un turban exotique. Malgré l’absence de contacts documentés entre les deux artistes, Vermeer a peut-être vu les peintures de Sweerts à Amsterdam, où il a eu des contacts pendant une grande partie de sa vie.
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Arthur K. Wheelock et Ben Broos dans Arthur K. Wheelock (ed.), Johannes Vermeer, catalogue d’exposition (Washington, National Gallery, 12 novembre 1995 au 11 février 1996, et La Haye, Mauritshuis, 1 mars au 2 juin 1996), The National Gallery of Art, Washington, 1995, pp. 166-168. Traduction de l’anglais par les éditeurs de Finestre sull’Arte.
Supercult. Arthur Wheelock et Ben Broos sur Jan Vermeer |
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